Monteverdi Libro 8 Madrigali Guerrieri Altri canti d`Amor Gira il
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Monteverdi Libro 8 Madrigali Guerrieri Altri canti d`Amor Gira il
Monteverdi Libro 8 Madrigali Guerrieri Altri canti d’Amor Gira il nemico insidioso Amore Hor che ’l ciel, e la terra, e ’l vento tace Armato il cor d’adamantina fede – A doi tenori Volgendo in ciel per immortal sentiero – Ballo à 5. Voci con doi violini Entracte Combattimento di Tancredi e Clorinda Se vittorie sì belle – A doi tenori* Ogni amante è guerrier – A doi tenori Ardo, avvampo, mi struggo, ardo: accorrete – A otto voci con doi violini * chanté par deux sopranos Textes chantés Altri canti d’Amor, tenero arciero, I dolci vezzi e i sospirati baci; Narri gli sdegni e le bramate paci Quand'unisce due alme un sol pensiero. Qu’un autre chante, d’Amour, tendre archer, Les doux jeux, les baisers désirés, Conte les fâcheries et les paix espérées Quand s’unissent deux âmes en unique pensée. Di Marte io canto furibundo e fiero I duri incontri e le battaglie audaci; Strider le spade e bombeggiar le faci Fo nel mio canto bellicoso e fiero. De Mars, le furieux et cruel, je veux chanter Les durs combats et les fières batailles ; Je ferai dans mon chant belliqueux, enragé, Se froisser les épées et tomber la mitraille. Tu cui tessuta han di Cesareo alloro La corona immortal Marte e Bellona, Gradisci il verde ancor novo lavoro, Et toi qui as tissé du laurier de César La couronne immortelle de Mars et de Bellone, Agrée ce travail encor vert et nouveau Ché, mentre guerre canta e guerre suona, O Gran Fernando, l'orgoglioso choro, Del tuo sommo valor canta e ragiona. Qui, tandis que le chœur orgueilleux, ô grand Ferdinand, chante de guerres et de guerres résonne, Ne chante et ne décrit que ta haute valeur. (D'incerto) (Attribution incertaine) Gira il nemico insidioso Amore La rocca del mio core. Sù presto, ch'egli [è] qui poco lontano: Armi, armi alla mano L’ennemi, l’insidieux Amour Prend à revers la forteresse de mon cœur. Debout, vite, il n’est plus bien loin ! Aux armes, aux armes à la main ! Nol lasciamo accostar, ch’egli non saglia Su la fiacca muraglia, Ma facciam fuor una sortita bella: Butta, butta la sella! Ne le laissons pas approcher, qu’il n’assaille pas La faible muraille, Mais faisons au dehors une belle sortie. Sellez, sellez les montures ! Armi false non son, ch'ei s'avvicina Col grosso [a] la cortina Sù presto, ch'egli [è] qui poco discosto: Tutti, tutti al suo posto! Ce n’est pas une feinte, car il s’approche, Avec les gros des troupes, de la courtine. Debout, vite, il est ici, tout près : Tous, tous à son poste ! Vuol de gl’occhi attaccar il baluardo Con impeto gagliardo. Sù presto, ch'egli [è] qui senza alcun fallo: Tutti, tutti a cavallo . Il veut s’attaquer au bastion des yeux Par une attaque gaillarde. Debout, vite, il est bientôt ici sans faute : Tous, tous à cheval ! Non è più tempo, ohimè, ch'egli ad un tratto Del cor padron s'è fatto. A gambe, a salvo chi si può salvare All'andar, all'andare! Il n’est plus temps, hélas, car d’un seul coup Du cœur il s’est rendu maître. À vos jambes ! Sauve qui peut ! Fuyez ! Fuyez ! Cor mio, non val fuggir; sei morto, e servo D’un tiranno protervo, Che ‘l vincitor, che [è] già dentro alla piazza, Grida: foco, ammazza! Mon cœur, que te sert de courir : tu es mort, Et serf d’un tyran plein d’arrogance : Car le vainqueur, déjà dans la place, Crie : Brûle ! Tue ! (Attribuito a Giulio Strozzi) (Attribué à Giulio Strozzi) Hor che ‘l ciel, e la terra, e ‘l vento tace E le fere, [e] gl'augelli il sonno affrena, Notte il carro stellato in giro mena, E nel suo letto il mar senz'onda giace, Maintenant que le ciel, et la terre, et les vents Font silence, que le sommeil dompte les fauves Et les oiseaux, que la Nuit fait tourner son char Constellé, et que la mer, étale, gît dans son lit, Veglio, penso, ardo, piango, e chi [mi] sface Sempre m'è innanzi per mia dolce pena Guerra è 'l mio stato, d'ira, e di duol piena, E sol di lei pensando ho qualche pace. Je veille, pense, brûle, pleure et qui me tue Est toujours devant moi pour ma douce douleur, Mon état est la guerre, et d’ire et de deuil pleine, Et je n’ai qu’en pensant à elle quelque paix. Così sol d'una chiara fonte viva Move 'l dolce, e l'amaro ond'io mi pasco; Una man sola mi risana, e punge, Ainsi, d’une seule source claire et vive Viennent le doux et l’amer dont je me pais ; C’est une seule main qui me guérit et blesse, E perché 'l mio martir non giung'a riva Mille volte il dì moro, e mille nasco, Tanto da la salute mia son lunge. Et, mon martyre ne pouvant trouver de rive, Mille fois par jour je meurs, et mille renais, Tant de mon salut je suis éloigné. (Francesco Petrarca, Sonetto CXXXI) (François Pétrarque, Sonnet CXXXI) Armato il cor d’adamantina fede, Nell’amoroso regno A militar ne vegno. Pugnerò con la morte, Contrasterò col ciel e con la sorte, Ch’intrepido guerriero, Se vittoria non ho, vita non chero. Le cœur armé d’adamantine foi, Je viens combattre Au royaume d’Amour. J’attaquerai la mort, Je me battrai contre le Ciel, contre le sort : Intrépide guerrier, Sans Victoire, je refuse la vie. (D'incerto) (Attribution incertaine) Ballo a cinque voci con doi violini Ballet à cinq voix et deux violons Voce Sola Poeta formato così dice En solo, le Poète, immobile, s’exprime ainsi : Volgendo in ciel per immortal sentiero Le ruote della luce alma, e serena, Un secolo di pace il sol rimena Sotto il Re novo del Romano Impero. Faisant tourner au ciel, selon un parcours éternel, Les roues de lumière, douce et sereine, Puisse le soleil ramener un siècle de paix Sous le nouveau Roi du Romain Empire. Bc: Entrata, & passeggio ut sopra. Entrée du Ballet, & passage comme ci-dessus. Poeta solo formato Le Poète, seul, immobile Su, mi si rechi omai del grand' Ibero Profonda tazza inghirlandata e piena Che, correndomi al cor di vena in vena, Sgombra da l'alma ogni mortal pensiero. Allons, que l’on m’apporte une profonde tasse Ornée de guirlandes, et pleine du grand vin d’Ibérie Qui, courant dans mon corps de veine en veine, Chasse de l’âme toute pensée de mort. TI, Bc : Entrata, & passeggio come di sopra. Entrée du Ballet, et passage comme ci-dessus. Poeta solo fermato Le Poète, en solo, immobile Venga la nobil cetra. Que vienne la noble lyre. T, Bc : Ricevuto il chitarone da la Ninfa si volta verso l'altre, & così gli parla. Après avoir reçu le luth des mains de la Nymphe, il se tourne vers elle & lui parle ainsi. Poeta solo Le Poète, en solo il crin di fiori Cingimi, o Filli. Ceins-moi de fleurs Les cheveux, ô Phillis ! T: Qui li pone la Ninfa la ghirlanda poi parla il poeta come segue. Bc: Qui li pone la Ninfa la ghirlanda poi parla come segue. Ms T : Ici, la Nymphe pose la guirlande, puis le poète s’exprime comme suit. Ms Bc : Ici la Nymphe pose la guirlande, puis s’exprime comme suit. Io ferirò le stelle Cantando del mio Re gli eccelsi allori. J’atteindrai les étoiles En chantant de mon Roi les glorieux lauriers. T, Bc: Qui, nel chitarone da lui sonato così segue. Ici, en s’accompagnant du luth, il poursuit : E voi che per beltà, donne e donzelle, Gite superbe d'immortali onori, Movete al mio bel suon le piante snelle. Et vous, Dames et Damoiselles, dont la beauté Vous a valu la fierté d’immortels honneurs, Bougez, à mon beau son, vos pieds agiles. Movete al mio bel suon le piante snelle, Sparso di rose il crin leggiadro e biondo. Bougez, à mon beau son, vos pieds agiles, Vos beaux cheveux blonds parsemés de roses. T, Bc: Qui alzando la voce con più forza invita le Ninfe dell'Istro a danzar anch'elle. E lasciato dell'Istro il ricco fondo Ici, haussant la voix avec plus de force, il invite les Nymphes du Danube à danser elles aussi. Et, laissant du Danube les riches profondeurs, Vengan l'humide Ninfe al ballo anch'elle. Que leurs humides Nymphes viennent aussi au bal. T, Bc: Entrata come di sopra, & le Ninfe dell'Istro escono al tempo di essa entrata come le prime. Et gionte al loro determinato loco tutte le Ninfe insieme danzano il seguente ballo. Entrée comme ci-dessus, & les Nymphes du Danube viennent danser sur la même entrée que les premières, puis chacune ayant gagné sa place, toutes les Nymphes dansent ensemble le ballet suivant. Balletto Riverenza Ballet Révérence Movete al mio bel suon le piante snelle, Sparso di rose il crin leggiadro e biondo. E lasciando dell'Istro il negro fondo Vengan l'umide Ninfe al ballo anch'elle. Bougez, à mon beau son, vos pieds agiles, Vos beaux cheveux blonds parsemés de roses, Et, laissant du Danube les riches profondeurs, Que leurs humides Nymphes viennent aussi au bal ! Fuggano in questo dì nembi e procelle D'aure odorate al mormorar de l'onde; Fatto Eco al mio cantar, rimbombi il Mondo L'opre di Ferdinando eccelse e belle. Qu’elles fuient ici nuages et tempêtes, Au murmure de l’onde sous la brise embaumée ; Et, se faisant l’Écho de mon chant, que le Monde Retentisse des hauts et beaux exploits de Ferdinand. C, Q, A, Bc: Qui in questo loco finita la presente prima parte. Si fà un canario, o passo e mezzo od'altro balletto, à beneplacito senza canto poi si ritorna sopra la prima aria come segue cangiando mutanza. Ms C, Q, A, Bc : Ici finit la première partie. On donne une canarie, ou un passemeze ou tout autre ballet, ad libitum, sans chant, puis on retourne au premier air, comme suit, en changeant la variation. Ei l'armi cinse, e su destrier alato Corse le piaggie, e su la terra dura La testa riposò su 'l braccio armato. Il a pris les armes, et sur son cheval ailé Il a couru les grèves, et sur la dure terre Il a posé la tête sur son bras armé. Là torri eccelse, e là superbe mura Al vento sparse, e fé vermiglio il prato, Lasciand'ogni altra gloria al mondo oscura. Les hautes tours, les murs superbes, Il les a fracassés à tous vents, en a rougi les prés, Obscurcissant toute autre gloire au monde. (Ottavio Rinuccini, Rime. Nel natale del Re di Francia Enrico IV.) (Ottavio Rinuccini, Poésies. Pour l’anniversaire du Roi de France Henri IV) *** ENTRACTE *** *** ENTRACTE *** Combattimento di Tancredi e Clorinda Le Combat de Tancrède et Chlorinde Testo Tancredi che Clorinda un homo stima vò l ne l'armi provarla al paragone. Va girando colei l'alpestre cima Vè r altra porta, ove d'entrar dispone. Segue egli impetuoso, onde assai prima Che giunga, in guisa avvien che d'armi suone, Ch'ella si volge e grida : Le Ré citant Tancrède, qui prend Chlorinde pour un homme, Veut l’éprouver au défi des armes. Elle s’apprête à contourner la haute cime Vers l’autre porte, où elle veut entrer. Lui, impétueux, la suit, mais bien avant Qu’il l’ait rejointe, il advient que ses armes sonnent Et qu’elle se retourne et crie: Clorinda Chlorinde “Ô toi, qu’apportes-tu, "O tu, che porte, Correndo sı̀?" Courant ainsi ?” Testo Rispose: Le Ré citant Il répondit : Tancredi "E guerra, e morte." Tancrè de Clorinda "Guerra e morte havrai" Chlorinde “Guerre et mort, tu les auras” Testo Le Ré citant “ Et guerre et mort” disse. Dit-elle Clorinda Chlorinde "Io non rifiuto Darlati, se la cerchi, e ferma attende." “Je ne refuse pas De les donner, si tu les cherches.” Testo Né vò l Tancredi, ch'ebbe a piè veduto Il suo nemico, usar cavallo, e scende; E impugna l'un, l'altro il ferro acuto, Ed aguzza l'orgoglio e l'ira accende; E vansi incontro a passi tardi e lenti Quai duo tori gelosi e d'ira ardenti. Notte, che nel profondo oscuro seno Chiudesti, e nell'oblio fatto sı̀grande: Degno d'un chiaro sol, degno d'un pieno Theatro opre sarian sı̀memorande. Piacciati ch'indi il tragga, e 'n bel sereno Alle future età lo spieghi e mande. Viva la fama lor, e tra lor gloria Splenda del fosco tuo l'alta memoria Le Ré citant De pied ferme, elle attend. Tancrède, qui voit son ennemi à pied, Ne veut pas profiter du cheval, et descend ; L’un et l’autre empoigne le fer aigu, Aiguise son orgueil, allume sa colère ; Ils vont l’un contre l’autre à pas lents et pesants Tels deux taureaux jaloux embrasés de colère. Nuit qui, dans les ténèbres de ton sein profond Et dans l’oubli, as renfermé un tel haut fait – Des exploits si mémorables sont dignes D’un clair soleil, d’un plein Théâtre –, Consens donc que je les retrace, et, dans la lumière, Qu’aux âges à venir je les dévoile et les transmette. Que vive leur mémoire, et qu’au sein de leur gloire Brille le souvenir de ton obscurité. Guerra Non schivar, non parar, non pur ritrarsi Voglion costor, né qui destrezz'ha parte. Non danno i colpi hor finti, hor pieni, hor scarsi: Toglie l'ombra e 'l furor l'uso de l'arte. Odi le spade orribilmente urtarsi A mezzo il ferro, e 'l piè d'orma non parte; Sempre il piè fermo e la man sempre in moto, Né scende taglio in van, né punta a voto. (Guerre) Ils ne veulent esquiver, ni parer, ni céder, Et la ruse ici n’est pas de mise. Pas de coups tantôt feints, ou pleins, ou mesurés : Et l’ombre et la fureur empêchent l’artifice. On entend les épées se heurter à mi-lame, Horriblement. Le pas ne quitte pas sa trace; Toujours le pied est ferme, la main en mouvement, Pas un coup de taille en vain, ni d’estoc à vide. L'onta irrita lo sdegno alla vendetta, E la vendetta poi l'onta rinova: Onde sempre al ferir, sempre alla fretta Stimol novo s'aggiunge e piaga nova. D'hor in hor più si mesce e più ristretta Si fa la pugna, e spada oprar non giova. Dansi con pomi, infelloniti e crudi, Cozzan con gli elmi insiem'e con gli scudi. L’outrage excite la fureur à la vengeance, Et la vengeance après renouvelle l’outrage : À frapper toujours, à presser toujours, Toujours renaît nouvel élan, nouvelle plaie. À chaque instant, plus on se mêle et plus serrée Se fait l’étreinte, on ne peut plus brandir l’épée. Félons, féroces, ils frappent du pommeau, Entrechoquent les heaumes, et les écus. Tre volte il cavalier la donna stringe Con le robuste braccia ed altre tante Poi da quei nodi tenaci ella si scinge, Nodi di fier nemico e non d'amante. Tornano al ferro, e l'un e l'altro il tinge Con molto sangue, e stanco ed anelante E questi e quegli al fin pur si ritira, E dopo lungo faticar respira. Trois fois le chevalier étreint la Dame De ses robustes bras, et par trois fois De l’étreinte tenace elle se sort – Étreinte d’ennemi féroce, et non d’amant. Ils reprennent le fer; l’un et l’autre le teint De moult sang, puis sans force, haletant, L’un et l’autre à la fin se retire, Et, après un si long effort, respire. L'un l'altro guarda, e del suo corpo esangue Su 'l pomo de la spada appoggia il peso. Già de l'ultima stella il raggio langue su 'l primo albor ch'è in oriente acceso. Vede Tancredi in maggior copia il sangue Del suo nemico, e sé non tanto offeso. Ne gode e insuperbisce. O nostra folle Mente ch'ogn'aura di fortuna estolle ! Chacun regarde l’autre, et de son corps exangue Au pommeau de l’épée il fait porter le poids. Déjà pâlit l’éclat de la dernière étoile, À la prime aube qui s’allume à l’orient. Tancrède voit perdu en plus grande abondance Le sang de son ennemi, lui-même moins atteint. Il s’en réjouit, exulte. O notre fol Esprit, qui s’enfle dès que souffle la fortune ! Misero, di che godi? O quanto mesti Fiano i trionfi ed infelice il vanto! Gli occhi tuoi pagheran (s'in vita resti) Di quel sangue ogni stilla un mar di pianto. Cosı̀tacendo e rimirando, questi Sanguinosi guerrier cessaro alquanto. Ruppe il silentio alfin Tancredi e disse, Perch'il suo nome a l'un l'altro scoprisse: Malheureux, de quoi te réjouis-tu ? Oh que tristes Se font les triomphes, et sinistre la gloire ! Tes yeux (si tu survis) paieront Chaque goutte de sang d’un océan de larmes. Ainsi, muets, se regardant, Ces deux guerriers sanglants s’arrêtent un moment. Tancrède enfin rompt le silence, et dit, Afin que l’un à l’autre ils révèlent leur nom : Tancredi - "Nostra sventura è ben, che qui s'impieghi tanto valor dove silentio il copra. Ma poi che sorte rea vien che ci nieghi E lode, e testimon degni de l'opra, Pregoti, se fra l'armi han loco i prieghi, Che 'l tuo nome e 'l tuo stato a me tu scopra, Acciò ch'io sappia, o vinto o vincitore, Chi la mia morte o la mia vita honore." Tancrè de – “Notre infortune est bien qu’ici s’emploie Tant de valeur, quand le silence la recouvre. Mais puisqu’un sort injuste nous dénie Et louange et témoin dignes de notre exploit, Je te prie – si parmi les armes il est un lieu Pour la prière – de me dire ton nom et ton état, Pour que je sache, ou vaincu ou vainqueur, Qui à ma mort, ou à ma vie, a fait honneur”. Testo Rispose la feroce: Le Ré citant La féroce répond : Clorinda Chlorinde - "Indarno chiedi Quel ch'ho per uso di non far palese. Ma chiunque io mi sia, tu inanzi vedi Un di quei duo che la gran torre accese." En vain tu me demandes Ce que j’ai coutume de ne pas révéler. Mais quel que soit mon nom, tu as devant les yeux Un des deux qui ont incendié la grande tour”. Testo Arse di sdegno a quel parlar Tancredi: Le Ré citant À ce discours, Tancrède brûle de fureur : Tancredi -"E in mal punto il dicesti; e 'l tuo dir e 'l tacer di par m'alletta, Barbaro discortese, alla vendetta." Tancrè de – “Tu as mal fait de dire cela ; Tes paroles, autant que ton silence, m’excitent, Barbare discourtois, à la vengeance.” Guerra Testo Torna l'ira nei cori e gli trasporta, Benché deboli, in guerra [a] fiera pugna, U' l'arte in bando, u' già la forza è morta, Ove, in vece, d'entrambi il furor pugna! O che sanguigna e spatiosa porta Fa l'una e l'altra spada, ovunque giugna, ne l'armi e nelle carni e se la vita Non esce, sdegno tienla al pett'unita. (Guerre) Le Ré citant La colère revient dans les cœurs et les pousse, Même sans forces, au combat, empoignade sauvage, Où l’art est banni, où la force est morte, Mais où c’est la fureur de chacun d’eux qui cogne ! Oh quelle sanglante et large porte Ouvre l’une et l’autre épée, où qu’elle frappe, Dans les armes ou dans les chairs, et si la vie Ne sort pas, c’est que la rage la tient unie au corps. Ma ecco homai l'hora fatal è giunta Che 'l viver di Clorinda al suo fin deve. Spinge egli ferro nel bel sen di punta Che vi s'immerge, e 'l sangue avido beve; E la veste, che d'or vago trapunta Le mammelle stringea tenera e leve, S'empie d'un caldo fiume. Ella già sente Morirsi, e 'l piè le manca egro e languente. Mais voici maintenant venue l’heure fatale Où la vie de Chlorinde doit trouver sa fin. Il lui pousse d’estoc le fer dans son beau sein Où la lame s’enfonce et boit son sang, avide ; Et sa robe, qui, brodée d’un bel or, Lui serrait, tendre et douce, les tétons, S’emplit d’un fleuve chaud. Déjà elle se sent Mourir, et le pied, faible et tremblant, lui manque. Segue egli la vittoria, e la trafitta, Vergine minacciando incalza, e preme. Ella, mentre cadea, la voce afflitta Movendo, disse le parole estreme, Parole ch'a lei novo spirto ditta: Spirto di fé , di carità , di speme: Virtù che Dio l'infonde, e se rubella In vita fu, la vol in morte ancella. Lui, pousse son avantage, et, transpercée, Il harcèle la vierge, et, menaçant, la presse. Elle tombe et d’une voix plaintive Prononce ses derniers mots, Des mots qu’un esprit nouveau lui dicte, Esprit de charité, de foi et d’espérance Vertus que Dieu lui inspire, car, si rebelle Elle fut dans sa vie, Il la veut Sa servante dans la mort. Clorinda -"Amico, hai vinto. Io ti perdon, perdona Tu ancora, al corpo no, che nulla pave, A l'alma sı̀: deh, per lei prega, e dona Battesmo a me ch'ogni mia colpa lave." Chlorinde – “Ami, tu as vaincu. Je te pardonne. Pardonne, Toi aussi, non pas au corps, qui ne craint rien, Mais à l’âme : ah, prie pour elle, et donne-moi Le Baptême, pour qu’il lave toutes mes fautes.” Testo In queste voci languide risuona Un non so che di flebile e soave Ch'al cor gli scende ed ogni sdegno ammorza, E gl'occhi a lagrimar l'invoglia e sforza. Le Ré citant Et dans ces mots languissants résonne Un je ne sais quoi de plaintif et de suave Qui descend sur son cœur, apaise sa fureur, Puis incite et contraint ses yeux à pleurer. Poco quindi lontan nel sen del monte Scaturia mormorando un picciol rio. Egli v'accorse e l'elmo empié nel fonte, E torno mesto al grande uffitio e pio. Tremar sentı̀la man, mentre la fronte Non conosciuta ancor sciolse e scoprı̀o. La vide e la conobbe, e restò senza E voce, e moto. Ahi vista! Ahi conoscenza! Non loin, cependant, au sein de la montagne, Sourdait, en murmurant, un ru. Il y court et remplit son heaume à la fontaine, Puis revient, triste, à son grand et pieux office. Il sent trembler sa main quand il libère Et découvre le front encore inconnu. Il la voit, la connaît, reste sans voix Ni mouvement. Ah! Quelle vue ! Quelle révélation ! Non morı̀già , ché sue virtuti accolse Tutte in quel punto e in guardia al cor le mise, E premendo il suo affanno a dar si volse Vita con l'acqua a chi co'l ferro uccise. Il ne meurt pas, car il a recueilli en cet instant Toutes ses forces, leur a confié la garde de son cœur. Dominant sa douleur, il s’emploie à donner La vie par l’eau à celle que par le fer il a tuée. Mentr'egli il suon de' sacri detti sciolse, Colei di gioia trasmutossi, e rise. E in atto di morir lieto, e vivace Dir parea: Tandis qu’il fait entendre les paroles sacrées, Elle, transfigurée par la joie, rit. Et, dans un élan joyeux et vif vers la mort, Semblait dire : Clorinda (CI : lunga voce in piano) S'apre il ciel, io vado in pace. Chlorinde (trè s lent, pianissimo) “Le ciel s’ouvre, je vais en paix”. Il Fine del Tancredi. Torquato Tasso, La Gerusalemme liberata, XII, 52-62, 64-68 Fin du Combat de Tancrè de Le Tasse, Jerusalem délivrée, XII, str. 52-62, 64-68 Se vittorie sì belle Han le guerre d'Amore, Fatti guerrier, mio core, E non temer de gl'amorosi strali Le ferite mortali. Pugna, [e] sappi ch'è gloria Il morir per desı̀o della vittoria. Si les guerres d’Amour Ont victoires si belles, Fais-toi guerrier, mon cœur, Et ne crains pas, des flèches de l’Amour, Les blessures mortelles. Bats-toi, et sache qu’il y a de la gloire À mourir par désir de Victoire. (Fulvio Testi, Rime, Nome di Vittoria) (Fulvio Testi, Rimes, Sur le nom de Victoire) Ogni amante è guerrier, nel suo gran regno Ha ben Amor la sua milizia anch'egli. Quella fiorita età , che 'l duro pondo Può sostener de l'elmo e de lo scudo, Negli assalti d'Amor fa prove eccelse. Né men sconcio è veder tremula mano Per troppa età , vibrar la spada, e l'hasta Che sentir sospirar canuto amante. Ambo le notti gelide, e serene E l'amante, e 'l guerrier traggon veggiando, Questi a salvar del capitan le tende, Questi a guardar l'amate mura [è ] intento, Non mai di faticar cessa il soldato, Né riposa già mai verace amante. Ambo sormonteran de' monti alpestri Le dure cime, ambo torrenti e fiumi Tra piogge, e nembi varcheran sicuri. Non del vasto ocean l'onde spumanti, Non d'Euro, o d'Aquilon l'orribil fiato Frenar potrà l'impetuosi cori Se di solcar il mar desı̀o gli sprona, Chi se non quei che l'amorosa insegna Segue, o di Marte al ciel notturno, e fosco Può la pioggia soffrir, le neve, e 'l vento? Taccia pur dunque omai lingua mendace Di più chiamar ozio, e lascivia Amore, Ch'Amor affetto è sol di guerrier core. Tout amant est guerrier, et dans son grand royaume Amour a, certes, son armée, lui aussi. Cette jeunesse en fleur, capable d’endurer Du casque et de l’écu le poids terrible, Fait des exploits dans les joutes d’Amour. Voir une main trop âgée, tremblante, brandir La lance et l’épée n’est pas moins incongru Que de voir soupirer un amoureux chenu. L’amant et le guerrier, tous deux passent des nuits Glaciales et sereines à veiller, l’un attentif À protéger les tentes de son capitaine, Et l’autre à contempler les demeures aimées. Jamais soldat ne relâche sa peine, Ni véritable amant ne repose jamais. L’un et l’autre vaincront des monts alpins Les âpres cimes, tous deux sauront passer, Sous la pluie et l’orage, torrents et fleuves. Ni du vaste océan les ondes écumeuses, Ni le souffle effrayant d’Eurus et d’Aquilon Ne pourraient arrêter ces cœurs impétueux Si le désir les prend de sillonner les mers. Qui, sinon ceux qui suivent l’étendard De l’Amour ou de Mars, peuvent dans la nuit noire Souffrir la pluie, et la neige, et le vent ? Que les langues menteuses cessent donc désormais D’appeler paresse ou bien lascivité Amour : L’Amour n’habite que les cœurs guerriers. Io, che nell'ozio nacqui, e d'ozio vissi, Che vago sol di riposata vita Moi, qui suis né oisif, et qui vécut oisif, Qui, seulement désireux de vivre en repos, Trapassava non pur l'hore notturne, Ma i giorni interi ancor tra molli piume; E tra grat'ombre, d'ogni cura scarco, Il fresco mi godea d'un' aura lieve, O 'l roco mormorar d'un picciol rivo Che fea tenor degli augelletti al canto, Io stesso, poi che generosa cura Di bellissimo Amor mi punse il core, All'hor che 'l guardo volsi al divin lume, Che sfavillar vidi io da que' begli occhi E 'l suono udii che da rubini, e perle Mi giunse al cor d'angelica favella, Sprezzando gli agi di tranquilla vita Non pur chiuggo a i gran dı̀tra 'l sonno i lumi, Ma ben sovente ancora, e stelle e sera Cangio, vigile amante, in sole, e in alba. Spesso carco di ferro all'ombra oscura Men vo sicur ove il desıo ̀ mi spinge; Passais non seulement les heures de la nuit, Mais des jours entiers dans de moelleuses plumes Et qui, à l’ombre heureuse, libre de tout souci, Jouissais de la fraîcheur du vent léger Ou du murmure sourd d’un ru Qui sous-tendait le chant des oiselets, Moi même, depuis que le soin généreux D’un très bel Amour m’a étreint le cœur, Quand mon regard a rencontré le rayon divin Que je vis étinceler dans ces beaux yeux, Et quand j’ai ouï le son des angéliques mots De perles et rubis qui m’arrivaient au cœur, Méprisant les aises de la vie tranquille, Loin de fermer les yeux dans un sommeil diurne Bien souvent même, amant veilleur, je change Les astres de la nuit en soleil de l’aurore. Souvent, bardé de fer, dans l’ombre obscure Je vais en sûreté où le désir me pousse ; E tante soffro ogni hor dure fatiche, Amoroso guerrier, ch'assai men greve Mi fura in un col valoroso Hispano Tentar pugnando l'ostinato Belga; O pur là dove inonda i larghi campi L'Istro real, cinto di ferro il busto, Seguir tra l'armi il chiaro, e nobil sangue Di quel gran Re ch'alle corone, a i lauri, Alle spoglie, a i trionfi il ciel destina. O sempre glorioso, o sempre invitto, Segui felice, e fortunato a pieno L'alte vittorie, e gloriose imprese, Ché forse un dı̀questa mia roca cetra Risonerà non vil ne' tuoi gran pregi, All'hor ch'al suon de l'armi Canterò le tue palme, e i chiari allori, Quando, l'hostil furor depresso e domo Dal tuo invitto valor, dal tuo gran senno, Udrà pien di spavento, e di terrore L'Oriente sonar belliche squille. E sovra gran destrier di ferro adorno Di stupor muti i faretrati Sciti, Tra mille, e mille cavalieri, e duci Carco di spoglie, o gran Fernando Ernesto, T'inchineranno, alla tua invitta spada, Vinti, cedendo le corone, e i regni. Et, guerrier amoureux, j’endure à chaque instant De si dures épreuves, que bien moins pénibles Me serait, dans un col célèbre d’Hispanie, De tenter de combattre le Belge obstiné, Ou bien, là où le royal Danube inonde Les vastes plaines, le buste ceint de fer, De suivre dans l’armée le clair et noble sang De ce grand Roi qu’aux couronnes, aux lauriers, Aux butins, aux triomphes le Ciel destine. Ô toujours glorieux, ô toujours invaincu, Poursuis, heureux et avec plein succès, Les glorieuses victoires, les hautes entreprises Que peut-être un jour ma pauvre cithare Fera résonner noblement pour tes louanges, Quand, dans le fracas des armes, Je chanterai tes palmes et tes brillants lauriers, Alors que, la fureur ennemie réprimée et domptée Par ta force invincible et ta grande sagesse, L’Orient, plein d’épouvante et de terreur, Entendra résonner les trompettes guerrières. Et devant toi, sur ton grand destrier bardé de fer, Parmi tes mille et mille cavaliers et capitaines, Chargé de butin, ô grand Ferdinand Ernest, Devant ton invincible épée, s’inclineront, muets De stupeur, percés de flèches, les Scythes, Vaincus, abandonnant couronnes et royaumes. Ma per qual ampio Egeo spieghi le vele Sı̀dal porto lontano, ardito amante? Riedi ché meco il mio cortese amico Veggio ch'a sı̀gran corso, a sı̀gran volo, Di pallido timor dipinge il viso. Mais toi, pour quelle vaste Égée mets-tu la voile, Si loin du port, ardente Muse ? Reviens, car, près de moi, je vois mon noble ami, Face à ce grand voyage, à ce haut vol, D’une pâle épouvante empreindre son visage. Riedi, ch’al nostr’ardir, ch’al nostro canto, Ch'ora d'armi, e d'amor confuso suona, Reviens, puisque par notre ardeur, notre chant, Qui sonne, en les mêlant, d’amour et d’armes, Scorger ben puote omai ch'Amore, e Marte EQ quasi in cor gentil cortese affetto. Tu as pu désormais bien voir qu’Amour et Mars Sont pour un noble cœur la même affection. (Ottavio Rinuccini, traduzione di Militat omnis Amans, & habet sua castra Cupido Attice crede mihi, &c. Ovid. Eleg.9 Am. lib.I. Al Signor Iacopo Corsi.) (Ottavio Rinuccini, d’après le Militat omnis amans, & habet sua castra Cupido Attice crede mihi, etc., Ovide, Amours, I, 9e ES lé gie. Au Seigneur Iacopo Corsi.) Ardo, avvampo, mi struggo, ardo: accorrete Vicini, amici, all'infiammato loco! Al ladro, al ladro, al tradimento, al foco! Scale, accette, martelli, acqua prendete! Je brûle, flambe, fonds, je brûle : accourez, Voisins, amis, accourez vers ce lieu en flammes ! Au voleur, au voleur, à la traîtrise, au feu ! Des haches, des échelles, des marteaux, de l’eau ! E voi, torri sacrate, anco tacete? Su bronzi su, ch'io dal gridar son roco: Dite il periglio altrui non lieve o poco, E de gli incendii miei pietà prendete. Et vous, clochers sacrés, vous vous taisez encore? À l’aide, bronze, à crier je n’ai plus de voix : Annoncez ce péril ni faible ni léger, Prenez pitié de mes incendies ! Son due begli occhi il ladro, e seco Amore, L'incendiario che l'inique faci Dentro la rocca m'avventò del core Le voleur : deux beaux yeux ; et avec lui Amour Est l’incendiaire, qui jeta ses brandons criminels Dedans la forteresse de mon cœur. Ecco i remedii omai vani, e fallaci. Mi dice ogn'un : per sı̀beato ardore Lascia che 'l cor s'incerisca, e taci. Mais tout secours est désormais vain, fallacieux. Chacun me dit : “d’une si belle ardeur Laisse se consumer ton cœur, et fais silence”. (Attribuito a Giulio Strozzi) (Attribué à Giulio Strozzi) © Traduction de Jean-Pierre Darmon