L`O S S E RVATOR E ROMANO

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L`O S S E RVATOR E ROMANO
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L’OSSERVATORE ROMANO
EDITION HEBDOMADAIRE
EN LANGUE FRANÇAISE
Unicuique suum
e
Non praevalebunt
Cité du Vatican
LXVIII année, numéro 9 (3.470)
jeudi 2 mars 2017
Mercredi des Cendres et début du Carême
Non à l’asphyxie de l’esprit
Dans l’après-midi du 1er mars, Mercredi
des Cendres, début du Carême, le Pape
François a célébré la Messe dans la basilique Sainte-Sabine au cours de laquelle
il a béni et imposé les cendres. Dans
son homélie il a rappelé que «le Carême
est le temps pour dire non. Non à l’asphyxie de l’esprit par la pollution causée par l’indifférence, par la négligence
à penser que la vie de l’autre ne me regarde pas, par toute tentative de banaliser la vie, spécialement celle de ceux qui
portent dans leur chair le poids de tant
de superficialité. Le Carême veut dire
non à la pollution intoxicante des paroles vides et qui n’ont pas de sens, de la
critique grossière et rapide, des analyses
simplistes qui ne réussissent pas à embrasser la complexité des problèmes humains, spécialement les problèmes de
tous ceux qui souffrent le plus. Le Carême est le temps pour recommencer à
respirer, c’est le temps pour ouvrir le
cœur au souffle de l’Unique capable de
transformer notre poussière en humanité».
Vers une guerre
mondiale
pour l’eau
Le monde se dirige-t-il «vers une
grande guerre mondiale pour
l’eau»? C’est ce que s’est demandé
François en intervenant, le 24 février, au séminaire sur le droit humain à l’eau, organisé par l’Académie pontificale des sciences. «Le
droit à l’eau est déterminant pour
la survie des personnes et décide
de l’avenir de l’humanité. Il est
prioritaire d’éduquer les prochaines générations sur la gravité de
cette réalité».
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Contre le trafic
d’êtres humains
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Procession pénitentielle de Saint-Anselme à Sainte-Sabine
Visite à l’église anglicane de All Saints
Le dialogue œcuménique se fait en chemin
François étudie actuellement la possibilité de se rendre au Soudan du
Sud avec l’archevêque de Canterbury, Justin Welby, pour apporter un
témoignage œcuménique de paix à
ce pays africain martyrisé. C’est le
Pape lui-même qui l’a révélé au
cours de la visite accomplie dans
l’après-midi du dimanche 26 février,
à l’église anglicane de All Saints, à
Rome.
En répondant aux questions
adressées par trois fidèles au terme
de la liturgie œcuménique, le Pape
a raconté qu’il avait reçu l’invitation
de trois évêques du Soudan du
Sud, un anglican, un presbytérien
et un catholique. «C’est d’elles, des
Eglises jeunes, qu’est venue cette
créativité» a-t-il souligné, en ajoutant: «Et nous réfléchissons pour
savoir si cela peut se faire, si la situation le permet là-bas. Mais — at-il assuré — nous devons le faire
parce qu’eux, tous les trois ensemble veulent la paix, et ils travaillent
ensemble pour la paix».
Au cours de l’entretien, le Pape a
également réaffirmé la nécessité du
«dialogue théologique» entre catholiques et anglicans pour affronter
des thèmes «sur lesquels nous ne
sommes pas encore d’accord».
Mais, a-t-il précisé, «on ne peut pas
faire cela en laboratoire: on doit le
faire en marchant, le long du chemin».
«Nous sommes en chemin — a-t-
il confirmé — et en chemin également nous discutons». Ainsi, en
chemin, «nous nous aidons, les uns
les autres, dans nos nécessités, dans
notre vie». En substance, a-t-il souligné, «on ne peut pas faire le dialogue théologique en étant immobiles. Le dialogue œcuménique se fait
en marchant, parce que le dialogue
œcuménique est un chemin, et les
choses théologiques se discutent en
chemin». Ainsi prend toute sa signification le jumelage entre l’église
anglicane et la paroisse catholique
de Ognissanti sur l’Appia nuova,
officialisé devant le Pape précisément au cours de sa visite. Pour
François, cela est également un signe qu’entre les catholiques et les
anglicans, «les relations se sont encore davantage améliorées». Et «cela me plaît, cela est bon», a-t-il
affirmé en invitant les fidèles à suivre l’exemple des Eglises jeunes qui
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«Le début de ce troisième millénaire est caractérisé par des mouvements migratoires qui, en termes
d’origine, de transit et de destination, concernent pratiquement
toutes les régions de la terre. Malheureusement, dans une grande
partie des cas, il s’agit de déplacements forcés, causés par des conflits, des catastrophes naturelles,
des persécutions, des changements
climatiques, des violences, une
pauvreté extrême et des conditions
de vie indignes. Face à ce scénario
complexe, je sens le devoir d’exprimer une préoccupation particulière pour la nature forcée de
nombreux flux migratoires contemporains, qui augmente les défis
à la communauté politique, à la
société civile et à l’Eglise et qui
exige que l’on réponde de façon
encore plus urgente à ces défis de
manière coordonnée et efficace.
Notre réponse commune pourrait
s’articuler autour de quatre verbes:
accueillir, protéger, promouvoir et
intégrer. Les migrations favorisent
la rencontre des peuples et la naissance de nouvelles civilisations»:
telles sont les paroles que le Pape
François a prononcées devant les
participants au forum international
Migrations et paix, reçus en audience le 21 février.
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ET
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DANS CE NUMÉRO
Page 2: Audience générale du 1er mars. Page 3: Angelus du 26 février. Conclusion de la rencontre d’Al-Azhar. Page 4: Audience à la délégation catholique pour la coopération. Décès du cardinal Desmond Connell. Page 8:
Paroles aux athlètes des Special Olympics d’hiver. Page 9: Messes à SainteMarthe. Page 10: Ur, un voyage manqué de Jean-Paul II, par Giovanni
Battista Re. Page 11: Informations.
L’OSSERVATORE ROMANO
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jeudi 2 mars 2017, numéro 9
Homélie lors du Mercredi des Cendres
Non à l’asphyxie
de l’esprit
Dans l’après-midi du mercredi 1er mars, Mercredi des Cendres, début du Carême,
le Pape François s’est rendu dans l’église Saint-Anselme sur l’Aventin, à Rome,
où a eu lieu un temps de prière, suivi d’une procession pénitentielle vers la
basilique Sainte-Sabine. Au terme de la procession, le Pape a présidé la
célébration eucharistique avec le rite de bénédiction et d’imposition des cendres.
Nous publions ci-dessous l’homélie prononcée par le Saint-Père.
«Revenez à moi de tout votre cœur,
[...] revenez au Seigneur votre
Dieu» (Jl 2, 12.13): c’est le cri par lequel le prophète Joël s’adresse au
peuple au nom du Seigneur; personne ne pouvait se sentir exclu: «Rassemblez les anciens, réunissez petits
enfants et nourrissons; [...] le jeune
époux [...] et la jeune mariée»
(v. 16). Tout le peuple fidèle est convoqué pour se mettre en chemin et
adorer son Dieu, «car il est tendre et
miséricordieux, lent à la colère et
plein d’amour» (v. 13).
Nous voulons nous aussi nous faire l’écho de cet appel, nous voulons
revenir au cœur miséricordieux du
Père. En ce temps de grâce que nous
commençons aujourd’hui, fixons une
fois encore notre regard sur sa misé-
ricorde. La Carême est un chemin: il
nous conduit à la victoire de la miséricorde sur tout ce qui cherche à
nous écraser ou à nous réduire à
quelque chose qui ne convient pas à
la dignité des fils de Dieu. Le Carême est la route de l’esclavage à la liberté, de la souffrance à la joie, de
la mort à la vie. Le geste des cendres
par lequel nous nous mettons en
chemin nous rappelle notre condition d’origine: nous avons été tirés
de la terre, nous sommes faits de
poussière. Oui, mais poussière dans
les mains amoureuses de Dieu qui
souffle son Esprit de vie sur chacun
de nous et veut continuer à le faire;
il veut continuer à nous donner ce
souffle de vie qui nous sauve des autres types de souffle: l’asphyxie étouffante provoquée par nos égoïsmes,
asphyxie étouffante générée par des
ambitions mesquines et des indifférences silencieuses; asphyxie qui
étouffe l’esprit, réduit l’horizon et
anesthésie les battements du cœur.
Le souffle de la vie de Dieu nous
sauve de cette asphyxie qui éteint
notre foi, refroidit notre charité et
détruit notre espérance. Vivre le Carême c’est désirer ardemment ce
souffle de vie que notre Père ne cesse de nous offrir dans la fange de
notre histoire.
Le souffle de la vie de Dieu nous
libère de cette asphyxie dont, souvent nous ne sommes pas conscients,
et que nous sommes même habitués
à «normaliser», même si ses effets se
font sentir; cela nous semble «normal» car nous sommes habitués à
Audience générale du 1er mars
De l’esclavage à la liberté
Chers frères et sœurs, bonjour!
Aujourd’hui, Mercredi des Cendres,
nous entrons dans le temps liturgique du Carême. Et étant donné
que nous accomplissons le cycle de
catéchèses sur l’espérance chrétienne, je voudrais vous présenter aujourd’hui le Carême comme chemin
d’espérance.
En effet, cette perspective est immédiatement évidente si nous pensons que le Carême a été institué
dans l’Eglise comme temps de préparation à Pâques, et donc tout le
sens de cette période de quarante
jours prend sa lumière du mystère
pascal vers lequel il est orienté.
Nous pouvons imaginer le Seigneur
Ressuscité qui nous appelle à sortir
de nos ténèbres, et nous nous mettons en chemin vers Lui, qui est la
Lumière. Et le Carême est un chemin vers Jésus Ressuscité, c’est un
temps de pénitence, et également
de mortification, qui n’est pas une
fin en soi, mais qui vise à nous faire
ressusciter avec le Christ, à renouveler notre identité baptismale,
c’est-à-dire à renaître à nouveau
«d’en haut», de l’amour de Dieu
(cf. Jn 3, 3). Voilà pourquoi le Carême est, de par sa nature, un
temps d’espérance.
Pour mieux comprendre ce que
cela signifie, nous devons nous référer à l’expérience fondamentale de
l’exode des Israélites de l’Egypte,
rapportée par la Bible dans le livre
qui porte ce nom: Exode. Le point
de départ est la condition d’esclavage en Egypte, l’oppression, les travaux forcés. Mais le Seigneur n’a
pas oublié son peuple et sa promesse: il appelle Moïse et, d’un bras
puissant, fait sortir les Israélites de
l’Egypte et les guide à travers le désert vers la Terre de la liberté. Au
cours de ce chemin de l’esclavage à
la liberté, le Seigneur donne aux
Israélites la loi, pour les éduquer à
l’aimer Lui, unique Seigneur, et à
s’aimer entre eux comme des frères.
L’Ecriture montre que l’exode est
long et tourmenté: il dure symboliquement 40 ans, c’est-à-dire le
temps de vie d’une génération. Une
génération qui, face aux épreuves
du chemin, est toujours tentée de
regretter l’Egypte et de revenir en
arrière. Nous aussi connaissons tous
la tentation de revenir en arrière,
tous. Mais le Seigneur demeure fidèle et ces pauvres gens, guidés par
Moïse, arrivent à la Terre promise.
Tout ce chemin est accompli dans
l’espérance: l’espérance de rejoindre
la Terre, et précisément dans ce
sens, il s’agit d’un «exode», une
sortie de l’esclavage vers la liberté.
Et ces 40 jours sont également pour
nous tous une sortie de l’esclavage,
du péché, vers la liberté, vers la
rencontre avec le Christ Ressuscité.
Chaque pas, chaque difficulté,
chaque épreuve, chaque chute et
chaque reprise, tout n’a de sens
qu’au sein du dessein de salut de
Dieu qui pour son peuple veut la
vie et non la mort, la joie et non la
douleur.
La Pâque de Jésus est son exode,
par lequel Il nous a ouvert la voie
pour parvenir à la vie pleine, éternelle et bienheureuse. Pour ouvrir
cette voie, ce passage, Jésus a dû se
dépouiller de sa gloire, s’humilier,
se faire obéissant jusqu’à la mort et
à la mort sur une croix. Nous ouvrir la voie à la vie éternelle lui a
coûté tout son sang, et grâce à Lui,
nous sommes sauvés de l’esclavage
du péché. Mais cela ne veut pas dire qu’il a tout fait et que nous ne
devons rien faire, qu’Il est passé à
travers la croix et que nous «allons
au paradis dans un carrosse». Il
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respirer un air où l’espérance est raréfiée, un air de tristesse et de résignation, un air étouffant de panique
et d’hostilité.
Le Carême est le temps pour dire
non. Non à l’asphyxie de l’esprit par
la pollution causée par l’indifférence,
par la négligence à penser que la vie
de l’autre ne me regarde pas, par
toute tentative de banaliser la vie,
spécialement celle de ceux qui portent dans leur chair le poids de tant
de superficialité. Le Carême veut dire non à la pollution intoxicante des
paroles vides et qui n’ont pas de
sens, de la critique grossière et rapide, des analyses simplistes qui ne
réussissent pas à embrasser la complexité des problèmes humains, spécialement les problèmes de tous
ceux qui souffrent le plus. Le Carême est le temps pour dire non; non
à l’asphyxie d’une prière qui nous
tranquillise la conscience, d’une aumône qui nous rend satisfaits, d’un
jeûne qui nous fait nous sentir bien.
Le Carême est le temps pour dire
non à l’asphyxie qui nait des intimismes qui excluent, qui veulent arriver
à Dieu en esquivant les plaies du
Christ présentes dans les plaies des
frères: ces spiritualités qui réduisent
la foi à une culture de ghetto et
d’exclusion.
Le Carême est le temps de la mémoire, c’est le temps pour penser et
nous demander: qu’en serait-il de
nous si Dieu nous avait fermé la
porte. Qu’en serait-il de nous sans
sa miséricorde qui ne s’est pas lassée
de pardonner et qui nous a toujours
donné l’occasion de recommencer à
nouveau? Le Carême est le temps
pour nous demander: où serionsnous sans l’aide de tant de visages
silencieux qui, de mille manières,
nous ont tendu la main et qui, par
des gestes très concrets, nous ont redonné l’espérance et nous ont aidé à
recommencer?
Le Carême est le temps pour recommencer à respirer, c’est le temps
pour ouvrir le cœur au souffle de
l’Unique capable de transformer notre poussière en humanité. Il n’est
pas le temps pour déchirer nos vêtements face au mal qui nous entoure,
mais plutôt pour faire de la place
dans notre vie à tout le bien que
nous pouvons faire, nous dépouillant de tout ce qui nous isole, nous
ferme et nous paralyse. Le Carême
est le temps de la compassion pour
dire avec le psalmiste: «Rends-moi
la joie d’être sauvé, que l’esprit généreux me soutienne», pour que par
notre vie nous proclamions ta louange (cf. Ps 51, 14), et pour que notre
poussière — par la force de ton souffle de vie — se transforme en «poussière aimée».
L’OSSERVATORE ROMANO
numéro 9, jeudi 2 mars 2017
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Angelus du 26 février
Le courage d’avoir confiance
Chers frères et sœurs, bonjour!
La
page
évangélique
d’aujourd’hui (cf. Mt 6, 24-34) est un
puissant rappel à faire confiance à
Dieu — ne pas oublier: faire confiance à Dieu — qui prend soin
des êtres vivants dans la création.
Il nourrit tous les animaux, se
préoccupe des lys et de l’herbe
des champs (cf. vv. 26-28); son regard bénéfique et attentionné
veille quotidiennement sur notre
vie. Celle-ci s’écoule assaillie par
de nombreuses préoccupations,
qui risquent d’ôter sérénité et
équilibre; mais cette angoisse est
souvent inutile, parce qu’elle ne
parvient pas à changer le cours
des événements. Jésus nous
exhorte avec insistance à ne pas
nous préoccuper du lendemain
(cf. vv. 25.28.31), en rappelant
qu’au-dessus de tout, il y a un
Père aimant qui n’oublie jamais
ses enfants: lui faire confiance ne
résout pas par magie les problèmes, mais permet de les affronter
avec l’esprit juste, courageusement, je suis courageux parce que
j’ai confiance en mon Père qui
prend soin de tout et qui m’aime
tant.
Dieu n’est pas un être lointain
et anonyme: il est notre refuge, la
source de notre sérénité et de notre paix. Il est le roc de notre salut, auquel nous pouvons nous
agripper dans la certitude de ne
pas tomber; celui qui s’agrippe à
Dieu ne tombe jamais! Il est notre défense contre le mal toujours
aux aguets. Dieu est pour nous le
grand ami, l’allié, le père, mais
nous ne nous en rendons pas toujours compte. Nous ne nous rendons pas compte que nous avons
un ami, un allié, un père qui nous
aime. Et nous préférons nous appuyer sur des biens immédiats,
que nous pouvons toucher, sur
des biens contingents, en oubliant, et parfois en refusant, le
bien suprême, c’est-à-dire l’amour
paternel de Dieu. Le sentir Père,
en cette époque où il y a tant
d’orphelins est si important! Dans
ce monde orphelin, le sentir comme Père. Nous nous éloignons de
l’amour de Dieu quand nous allons à la recherche obsessive des
biens terrestres et des richesses,
en faisant ainsi preuve d’un
amour exagéré envers ces réalités.
Jésus nous dit que cette recherche fébrile est illusoire et motif de
tristesse. Et il donne à ses disciples une règle de vie fondamentale: «Cherchez d’abord le royaume
de Dieu» (v. 33). Il s’agit de réaliser le projet que Jésus a annoncé
dans le Discours sur la montagne,
en se fiant à Dieu qui ne déçoit
pas — tant d’amis ou tant de personnes que nous pensions être
nos amis nous ont déçus; Dieu ne
déçoit jamais! —; se prodiguer en
tant qu’administrateurs fidèles des
biens qu’Il nous a donnés, y compris les biens terrestres, mais sans
«en faire trop» comme si tout, y
compris notre salut, dépendait
seulement de nous. Cette attitude
évangélique exige un choix clair,
que le passage du jour indique
avec précision: «Vous ne pouvez
servir Dieu et l’argent» (v. 24).
Soit le Seigneur, soit les idoles
Conclusion de la rencontre entre catholiques et musulmans à Al-Azhar
Des valeurs communes
Rejeter toute forme de fanatisme, d’extrémisme et de
violence au nom de la religion; promouvoir la connaissance réciproque, les valeurs communes et la tolérance. C’est ce que souhaitent le Centre pour le dialogue d’Al-Azhar et le Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux dans le communiqué conjoint publié au terme du symposium qui s’est déroulé au Caire, en Egypte, les 22 et 23 février.
Une rencontre qui «s’est déroulée de façon très positive» et qui a «satisfait» le cardinal président du dicastère Jean-Louis Tauran, à la tête de la délégation
catholique. Les travaux ont été inaugurés par les interventions du cardinal, du vice-grand Imam d’AlAzhar, le sheikh Abbas Shouman, et du directeur du
Centre pour le dialogue de l’institution académique
sunnite, Mahmoud Hamdi Zakzouk. Au cours des
deux journées, les participants ont présenté six recherches, en arabe et en anglais, sur les causes du fanatisme, de l’extrémisme et de la violence religieuses,
et sur les modalités de lutte contre ces phénomènes,
dont l’Egypte elle-même est victime en ces heures. Au
terme de la rencontre, les participants ont publié une
déclaration commune contenant une douzaine de recommandations.
La première souligne l’importance du dialogue entre la plus haute autorité d’Al-Azhar, le sheikh
Ahmad Muhammad al-Tayyib, et le conseil pontifical;
la deuxième réitère la nécessité du respect de la diversité religieuse. En outre, la pauvreté, l’ignorance,
l’abus politique de la religion et
l’interprétation erronée des textes
sacrés ont été identifiés parmi les
causes du fanatisme et de l’extrémisme. A ce propos, il a été suggéré de prêter une attention particulière aux jeunes, en ouvrant des canaux de dialogue, en les formant et
en les éduquant de façon correcte
aux «valeurs communes» partagées, telles que la miséricorde,
l’amour et le respect.
Le deuxième bloc de recommandations se rapporte à ce que les
deux institutions concernées peuvent faire ensemble pour promouvoir les relations entre les peuples,
les personnes, les civilisations et les
religions, afin de garantir la paix,
la sécurité et la stabilité. Dans la
conscience que des rencontres comme celle qui s’est déroulée dans la capitale égyptienne
peuvent également servir à clarifier toute conviction
erronée et à confirmer la valeur de la tolérance parmi
les fidèles des religions, les participants ont enfin exhorté tous les gouvernements, les organisations et les
autorités internationales à coopérer entre elles pour
faire obstacle aux groupes extrémistes et violents.
A ce propos, les dernières recommandations concernent des actions concrètes pour combattre de façon réaliste les organisations terroristes, par exemple
en asséchant leurs ressources, et en arrêtant ceux qui
les fournissent en argent et en armes, afin de protéger
les jeunes de leurs idéologies dévastatrices.
fascinantes, mais illusoires. Ce
choix que nous sommes appelés à
accomplir se répercute ensuite sur
nombre de nos actes, programmes
et engagements. C’est un choix à
faire de façon nette et à renouveler constamment, parce que les
tentations de tout réduire à l’argent, au plaisir et au pouvoir,
sont menaçantes. Il y a tant de
tentations à ce sujet.
Tandis qu’honorer ces idoles
conduit à des résultats tangibles,
bien que fugaces, faire des choix
pour Dieu et son Royaume ne
donne pas toujours des fruits immédiats. C’est une décision qui se
prend dans l’espérance et qui laisse à Dieu la pleine réalisation.
L’espérance chrétienne vise à l’accomplissement futur de la promesse de Dieu et ne s’arrête devant aucune difficulté, parce
qu’elle est fondée sur la fidélité
de Dieu, qui ne faillit jamais. Il
est fidèle, c’est un père fidèle,
c’est un ami fidèle, c’est un allié
fidèle.
Que la Vierge Marie nous aide
à nous confier à l’amour et à la
bonté du Père céleste, à vivre en
Lui et avec Lui. C’est le présupposé pour surmonter les tourments et les adversités de la vie,
ainsi que les persécutions, comme
nous le montre le témoignage
d’un grand nombre de nos frères
et sœurs.
A l’issue de l’Angelus, le Saint-Père
a prononcé les paroles suivantes:
Chers frères et sœurs, je vous salue tous, pèlerins de Rome, d’Italie et de divers pays.
Je salue le groupe venu à l’occasion de la «journée des maladies rares» — merci, merci à vous
pour ce que vous faites — et je
souhaite que les patients et leurs
familles soient soutenus de façon
adéquate dans leur parcours difficile, tant au niveau médical que
législatif.
Je souhaite à tous un bon dimanche. S’il vous plaît, n’oubliez
pas de prier pour moi. Bon déjeuner et au revoir!
L’OSSERVATORE ROMANO
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jeudi 2 mars 2017, numéro 9
Discours à une délégation de l’épiscopat français engagée dans la coopération entre les peuples
Non à un monde qui élève des murs
Un nouvel appel à construire des
ponts «dans un monde où s’élèvent
encore tant de murs par peur des
autres» a été lancé par le Pape au
cours de l’audience — qui s’est
déroulée dans la matinée du samedi
25 février dans la salle des Papes
— à la délégation catholique pour
la coopération, de la Conférence
épiscopale française.
Chers amis,
C’est avec joie que je vous accueille dans le cadre du pèlerinage que vous accomplissez à Rome
pour le cinquantième anniversaire
de la Délégation catholique pour la
coopération. A travers vous, j’adresse mon cordial salut à tous les volontaires envoyés dans plus de
cinquante pays, ainsi qu’à toutes
les personnes qui, aujourd’hui
comme hier, bénéficient de leur
présence et de leurs compétences.
Comme l’a écrit le bienheureux
Paul VI dans l’encyclique Populorum progressio, «le développement
ne se réduit pas à la simple croissance économique. Pour être authentique, il doit être intégral,
c’est-à-dire promouvoir tout homme et tout l’homme […] La solidarité mondiale, toujours plus efficiente, doit permettre à tous les
peuples de devenir eux-mêmes les
artisans de leur destin» (nn. 14 et
65). Ces convictions ont conduit
l’Eglise en France à créer, il y a
cinquante ans, la Délégation catholique pour la coopération, en fidélité au grand élan missionnaire auquel elle a su apporter sa généreuse contribution au cours des
siècles. Avec vous, je rends grâce
au Seigneur pour l’œuvre de son
Esprit manifestée dans le cheminement humain et spirituel des
volontaires et dans le travail d’accompagnement des projets de développement que votre organisation a permis. Ainsi vous servez
Audience générale du 1er mars
SUITE DE LA PAGE 2
n’en est rien. Notre salut est certainement un don de sa part, mais,
étant donné qu’il s’agit d’une histoire d’amour, il exige notre «oui»
et notre participation à son amour,
comme nous le démontre notre
Mère Marie et après elle tous les
saints.
Le Carême vit de cette dynamique: le Christ nous précède avec
son exode, et nous traversons le
désert grâce à Lui et derrière Lui.
Il est tenté pour nous, et a vaincu
le Tentateur pour nous, mais nous
aussi devons affronter avec Lui les
tentations et les surmonter. Il nous
donne l’eau vive de son Esprit, et
c’est à nous qu’il revient de puiser
à sa source et de boire, dans les sacrements, dans la prière, dans
l’adoration; Il est la lumière qui
vainc les ténèbres et il nous est demandé d’alimenter la petite flamme
qui nous a été confiée le jour de
notre baptême.
Dans ce sens, le Carême est «le
signe sacramentel de notre conversion» (Missel romain, prière de la
collecte, 1er dimanche de Carême);
qui accomplit le chemin du Carême est toujours sur le chemin de la
conversion. Le Carême est le signe
sacramentel de notre chemin de
l’esclavage à la liberté, toujours à
renouveler. Un chemin certes exigeant, mais un chemin plein d’espérance. Je dirais même plus:
l’exode de Carême est le chemin
sur lequel l’espérance elle-même se
forme. La difficulté de traverser le
désert — toutes les épreuves, les
tentations, les illusions, les mirages... — tout cela sert à forger une
espérance forte, solide, sur le modèle de celle de la Vierge Marie,
qui au milieu des ténèbres de la
passion et de la mort de son Fils,
continua à croire et à espérer dans
sa résurrection, dans la victoire de
l’amour de Dieu.
Avec le cœur ouvert à cet horizon, entrons aujourd’hui dans le
Carême. En nous sentant partie du
peuple saint de Dieu, commençons
avec joie ce chemin d’espérance.
Parmi les pèlerins qui assistaient à
l’audience générale du 1er mars, se
trouvaient les groupes francophones
suivants:
De France: Lycée Blomet, de Paris; collège Saint-Charles, de Pignan; collège Saint-Joseph, de
Saint-Cloud.
De Suisse: Groupe de jeunes de
Val d’Illiez.
De Belgique: Paroisse SainteJulienne; communauté de l’Emmanuel.
Je suis heureux de saluer les pèlerins de langue française, en particulier les jeunes de Paris, Pignan,
Saint-Cloud et de Suisse ainsi que
les fidèles venant de Belgique. Que
le Carême soit pour nous un chemin de joie et d’espérance, grâce à
la force de l’amour miséricordieux
du Seigneur et l’aide de la Vierge
Marie, afin que nous puissions ressusciter avec le Christ. Que Dieu
vous bénisse!
une véritable coopération entre sortie qui se fait proche des perles Eglises locales et entre les sonnes en situation de souffrance,
peuples, refusant la misère et de précarité, de marginalisation,
agissant pour un monde plus jus- d’exclusion. Soyez les serviteurs
d’une Eglise qui permet à chacun
te et plus fraternel.
«Le mot “solidarité” est un peu de reconnaitre l’étonnante proxiusé et, parfois, on l’interprète mité de Dieu, sa tendresse et son
mal, mais il désigne beaucoup amour et d’accueillir la force qu’il
plus que quelques actes sporadi- nous donne en Jésus Christ, sa
ques de générosité. Il demande Parole vivante, pour déployer nos
de créer une nouvelle mentalité talents en vue du bien de tous et
qui pense en termes de commu- de la sauvegarde de notre maison
nauté, de priorité de la vie de commune.
En demandant au Seigneur de
tous sur l’appropriation des biens
par quelques-uns» (Exhort. ap. vous aider à servir la culture de la
Evangelii gaudium, n. 188). C’est rencontre au sein de l’unique fabien dans cette dynamique que la mille humaine, je vous donne la
Délégation catholique pour la co- Bénédiction apostolique, ainsi
opération a voulu inscrire son ac- qu’à tous les membres de la Délétion, en mettant en place un véri- gation catholique pour la coopératable partenariat avec les Eglises tion. Merci.
et les acteurs locaux des
pays où les volontaires
sont envoyés, et en travaillant de concert avec
les autorités civiles et
toutes les bonnes volontés. Elle contribue ainsi à
une authentique conversion écologique qui reLe cardinal irlandais Desmond Connell,
connaît l’éminente digniarchevêque émérite de Dublin (Irlande) est mort
té de chaque personne,
dans la nuit du 20 au 21 février. Né dans la
sa valeur propre, sa créacapitale irlandaise le 24 mars 1926, il avait été
tivité et sa capacité à reordonné prêtre le 19 mai 1951. Il avait été
chercher et à promouvoir
nommé archevêque de Dublin le 21 janvier
le bien commun (cf. Enc.
1988 et avait reçu l’ordination épiscopale le 6
Laudato si’, nn. 216-221).
mars suivant; puis il avait été créé cardinal lors
J’encourage donc tous
du consistoire du 21 février 2001, avec le titre
les membres de la Déléde San Silvestro in Capite. Le 26 avril 2004,
gation catholique pour la
il avait renoncé à la charge pastorale de
coopération à «faire granl’archidiocèse. Ayant appris la nouvelle, le Pape
dir une culture de la miFrançois a envoyé un télégramme de
séricorde, fondée sur la
condoléances à S.Exc. Mgr Diarmuid Martin,
redécouverte de la renarchevêque de Dublin.
contre des autres: une
culture dans laquelle perProfondément attristé par la mort du cardisonne ne regarde l’autre
nal Desmond Connell, je vous présente mes
avec indifférence ni ne
sincères condoléances, ainsi qu’au clergé, aux
détourne le regard quand
religieux et aux fidèles laïcs de l’archidiocèse.
il voit la souffrance des
En rappelant avec gratitude les années de géfrères» (Lett. ap. Miserinéreux ministère sacerdotal et épiscopal dans
cordia et misera, n. 20).
l’archidiocèse de Dublin du cardinal ConN’ayez pas peur de parnell, et ses nombreuses contributions à l’Eglicourir les routes de la
se en Irlande, en particulier dans le domaine
fraternité et de construire
des études philosophiques, je m’unis à vous
des ponts entre les hompour confier son âme à l’amour miséricormes et entre les peuples,
dieux de Dieu tout-puissant. Dans l’espérandans un monde où s’élèce certaine de la Résurrection, je donne de
vent encore tant de murs
tout cœur ma Bénédiction apostolique à
par peur des autres. A
ceux qui pleurent le défunt cardinal, en gage
travers vos initiatives, vos
de réconfort et de paix dans le Seigneur
projets et vos actions,
Jésus.
vous rendez visible une
Eglise pauvre avec et pour
FRANÇOIS
les pauvres, une Eglise en
Décès du cardinal
Desmond Connell
numéro 9, jeudi 2 mars 2017
L’OSSERVATORE ROMANO
page 5
Clôture du séminaire sur un droit humain vital
Vers une guerre mondiale pour l’eau
Le monde se dirige-t-il «vers une grande guerre mondiale pour l’eau»?
C’est ce que s’est demandé le Pape François en intervenant, dans l’aprèsmidi du vendredi 24 février, à la session de clôture du séminaire sur le
droit humain à l’eau, organisé par l’Académie pontificale des sciences et qui
avait commencé la veille à la Casina Pio IV, au Vatican. Après une brève
introduction du cardinal brésilien Cláudio Hummes, le Pape a prononcé le
discours suivant.
Chers frères et sœurs,
bon après-midi.
et vos instruments afin de donner
une réponse à ce besoin et à cette
Je vous salue tous, ici présents, et problématique que vit l’homme
je vous remercie pour votre parti- d’aujourd’hui.
Comme on le lit dans le livre
cipation à cette rencontre qui soulève la problématique du droit de la Genèse, l’eau est à l’origine
humain à l’eau et l’exigence de de toutes les choses (cf. Gn 1, 2);
politiques publiques qui puissent elle est une «créature utile, pure
faire face à cette réalité. Il est si- et humble», source de la vie et de
gnificatif que vous vous unissiez la fécondité (cf. Saint François
pour apporter vos connaissances d’Assise, Cantique des Créatures).
C’est pourquoi la question que vous traitez
n’est pas marginale, mais
fondamentale et très urgente. Fondamentale parce que là où il y a l’eau,
il y a la vie, et la société
peut naître et progresser.
Et cela est urgent, parce
La déclaration sur le droit humain à l’eau,
que notre maison comdocument de conclusion du séminaire qui
mune a besoin de protecs’est déroulé au Vatican, part de la
tion et également que
constatation qu’un grand nombre des
l’on comprenne que tousystèmes économiques et productifs, ainsi
te eau n’est pas vie: unique les styles de vie actuels dégradent
quement l’eau sûre et de
l’environnement. Le premier signataire
qualité — en continuant
a été précisément le Pape François, au cours
avec la figure de saint
de la session de clôture des travaux au siège
François: l’eau «qui sert
de l’Académie pontificale des sciences, qui a
avec
humilité»,
l’eau
organisé le rendez-vous en collaboration
«pure», non contaminée.
avec «La Cátedra del dialogo y la cultura
Toute personne a droit
del encuentro».
à l’accès à l’eau potable
«Nous avons besoin — lit-on dans le
et sûre; c’est un droit hudocument — d’une éducation qui contribue à
main essentiel et une des
un changement culturel autour de la
questions cruciales dans
reconnaissance de l’autre et de la défense de
le monde actuel (cf. Enl’eau et des écosystèmes». Cela exige une
nouvelle mentalité, grâce à
laquelle la science et la
technologie pourront apporter
des contributions
fondamentales dans la
préservation de l’eau et de son
usage universel. Pour protéger
les biens communs, poursuit la
déclaration finale, il est
nécessaire de «compter sur des
instruments juridiques plus
efficaces». C’est pourquoi «la
perspective des droits humains
peut faire la différence; éviter
que la fourniture d’eau et de
services d’hygiène ne tombent
dans le pouvoir discrétionnaire
de groupes d’influence, mais
constituent au contraire une
obligation juridiquement
contraignante».
Pour atteindre cet objectif, il
cyclique
Laudato
si’,
faut des gouvernements «dotés de volonté et
n. 30; Encyclique Caritas
de force politique et qui puissent mettre en
in veritate, n. 27). Cela
œuvre les changements nécessaires en suivant
est douloureux quand la
l’impératif moral des Objectifs de
législation d’un pays ou
développement durable approuvés après le
d’un groupe de pays ne
discours du Pape François à la communauté
considère pas l’eau cominternationale». Cela exige un engagement
me un droit humain. Et
encore plus douloureux
collectif en vue de l’élaboration de politiques
quand on revient sur ce
publiques au niveau mondial, au niveau des
qui a été écrit et que l’on
Etats et au niveau local, qui incluent des
nie ce droit humain.
«mécanismes de participation réels et
C’est un problème qui
effectifs en vue du plein exercice de la
nous concerne tous, et
citoyenneté et de la sauvegarde des biens
qui fait que notre maison
communs».
commune endure tant de
Un changement culturel
est nécessaire
Des femmes en route pour chercher de l’eau en Somalie (Reuters)
misère et réclame des solutions effectives, véritablement capables
de dépasser les égoïsmes qui empêchent la mise en œuvre de ce
droit vital pour tous les êtres humains. Il est nécessaire de donner
à l’eau la place centrale qu’elle
mérite dans le cadre des politiques publiques. Notre droit à
l’eau est aussi un devoir à l’égard
de l’eau. Du droit que nous en
avons, dérive une obligation qui
lui est liée et qui ne peut s’en distinguer. Il est indispensable d’annoncer ce droit humain essentiel
et de le défendre — comme on le
fait actuellement —, mais aussi
d’agir de façon concrète; en assurant un engagement politique et
juridique à l’égard de l’eau. En ce
sens, tout Etat est appelé à concrétiser, y compris par des instruments juridiques, ce qui est indiqué dans les résolutions approuvées par l’assemblée générale
des Nations unies en 2010 sur le
droit humain à l’eau potable et à
l’hygiène. D’autre part, tout acteur non étatique doit assumer ses
responsabilités envers ce droit.
Le droit à l’eau est déterminant
pour la survie des personnes
(cf. ibid., n. 30) et décide de l’avenir de l’humanité. Il est prioritaire également d’éduquer les prochaines générations à la gravité
de cette réalité. La formation de
la conscience est un devoir difficile; il exige conviction et dévouement. Je me demande si au milieu de cette «troisième guerre
mondiale combattue par morceaux» que nous sommes en train
de vivre, nous ne nous dirigeons
pas vers la grande guerre mondiale pour l’eau.
Les statistiques dont les Nations unies font état sont bouleversantes et ne peuvent nous laisser indifférents: mille enfants
meurent chaque jour à cause de
maladies liées à l’eau; des millions
de personnes consomment de
l’eau polluée. Il s’agit de données
très graves; il faut freiner et inverser cette situation. Il n’est pas
trop tard, mais il est urgent de
prendre conscience du besoin
d’eau et de sa valeur essentielle
pour le bien de l’humanité.
Le respect de l’eau est une condition pour l’exercice des autres
droits humains (cf. ibid., n. 30). Si
nous respectons ce droit comme
fondamental, nous poserons les
bases pour protéger les autres
droits. Mais si nous violons ce
droit essentiel, comment pourrons-nous veiller sur les autres et
lutter pour eux! Dans cet engagement de donner à l’eau la place
qui lui revient, une culture de protection est nécessaire (cf. ibid.,
n. 231) — on dirait une chose poétique, et d’ailleurs, la création est
une «poiesis», cette culture de la
protection qui est créative — et en
outre promouvoir une culture de
la rencontre, où s’unissent dans
une cause commune toutes les
forces nécessaires de scientifiques
et d’entrepreneurs, de gouvernants et d’hommes politiques. Il
faut unir toutes nos voix dans
une même cause; ce ne seront
plus des voix individuelles ou isolées, mais le cri du frère qui s’élève par notre intermédiaire est le
cri de la terre qui demande le respect et le partage responsable
d’un bien, qui est à tous. Dans
cette culture de la rencontre, l’action de chaque Etat, en tant que
garant de l’accès universel à l’eau
sûre et de qualité, est indispensable.
Dieu Créateur ne nous abandonne pas dans ce travail pour
donner à tous et à chacun un accès à l’eau potable et sûre. Mais
le travail est le nôtre, la responsabilité est la nôtre. Je souhaite que
ce séminaire soit une occasion
propice pour que vos convictions
soient renforcées et que vous sortiez d’ici avec la certitude que votre travail est nécessaire et prioritaire pour que d’autres personnes
puissent vivre. C’est un idéal
pour lequel il vaut la peine de
lutter et de travailler. Avec notre
«peu» nous contribuerons à rendre notre maison commune plus
habitable et plus solidaire, plus
soignée, une maison où personne
n’est rejeté ni exclu, où nous
jouissons tous des biens nécessaires pour vivre et grandir dans la
dignité. Et n’oublions pas les
données, les statistiques des Nations unies. N’oublions pas que
chaque jour mille enfants —
chaque jour! — meurent de maladies liées à l’eau. Merci.
L’OSSERVATORE ROMANO
numéro 9, jeudi 2 mars 2017
Audience au Forum international Migrations et paix
Lutter contre les trafiquants
de chair humaine
«Accueillir», «protéger», «promouvoir»
et «intégrer»: tels sont les quatre verbes
que le Pape François a soumis à
l’attention des participants au forum
international Migrations et paix, reçus
en audience le mardi 21 février dans la
salle Clémentine. «Conjuger ces quatre
verbes» à l’égard de «frères et sœurs
qui, pour des raisons diverses, sont forcés
de quitter leur lieu d’origine», a rappelé
le Pape, est «un devoir de justice, de
civilisation et de solidarité».
Mesdames et Messieurs,
J’adresse à chacun de vous mes salutations cordiales, ainsi qu’une sincère
gratitude pour votre précieux travail.
Je remercie Mgr Tomasi pour ses aimables paroles et M. Pöttering pour
son intervention; je suis également reconnaissant pour les trois témoignages qui représentent concrètement le
thème de ce forum: «Intégration et
développement: de la réaction à l’action». En effet, il n’est pas possible
de lire les défis actuels des mouvements migratoires contemporains et
de la construction de la paix sans in-
clure le binôme «développement et
intégration»: c’est dans ce but que j’ai
voulu instituer le Dicastère pour le service du développement humain intégral, à
l’intérieur duquel une section s’occupe spécifiquement de ce qui concerne
les migrants, les réfugiés et les victimes de la traite.
Les migrations, dans leurs différentes formes, ne représentent certes pas
un phénomène nouveau dans l’histoire de l’humanité. Elles ont profondément marqué chaque époque, favorisant la rencontre des peuples et la
naissance de nouvelles civilisations.
Dans son essence, migrer est l’expression du désir intrinsèque de bonheur
propre à tout être humain, un
bonheur qui doit être recherché et
poursuivi. Pour nous, chrétiens, toute
la vie terrestre est un itinéraire vers
notre patrie céleste.
Le début de ce troisième millénaire
est fortement caractérisé par des mouvements migratoires qui, en termes
d’origine, de transit et de destination,
concernent pratiquement toutes les régions de la terre. Malheureusement,
dans une grande partie des cas, il
s’agit de déplacements forcés, causés
par des conflits, des catastrophes naturelles, des persécutions, des changements climatiques, des violences, une
pauvreté extrême et des conditions de
vie indignes: «Le nombre de personnes qui émigrent d’un continent à
l’autre, de même que celui de ceux
qui se déplacent à l’intérieur de leurs
propres pays et de leurs propres aires
géographiques, est impressionnant.
Les flux migratoires contemporains
constituent le plus vaste mouvement
de personnes, sinon de peuples, de
tous les temps»1.
Face à ce scénario complexe, je sens
le devoir d’exprimer une préoccupation particulière pour la nature forcée
de nombreux flux migratoires contemporains, qui augmente les défis à
la communauté politique, à la société
civile et à l’Eglise et qui exige que
l’on réponde de façon encore plus urgente à ces défis de manière coordonnée et efficace.
Notre réponse commune pourrait
s’articuler autour de quatre verbes: accueillir, protéger, promouvoir et intégrer.
Accueillir: «Il y a un caractère de refus qui nous rapproche, qui nous conduit à ne pas regarder le prochain
comme un frère à accueillir, mais à le
laisser hors de notre horizon personnel de vie, à le transformer plutôt en
un concurrent, en un sujet à dominer»2. Devant ce caractère de refus,
enraciné, en ultime analyse, dans
l’égoïsme et amplifié par des démagogies populistes, un changement d’attitude est urgent, pour surmonter l’indifférence et préférer aux craintes une
attitude généreuse d’accueil envers
ceux qui frappent à nos portes. Pour
ceux qui fuient les guerres et de terribles persécutions, souvent pris au pièges dans les filets d’organisations criminelles sans scrupules, il faut ouvrir
des canaux humanitaires accessibles et
sûrs. Un accueil responsable et digne
de nos frères et sœurs commence en
leur donnant un premier hébergement
dans des espaces adéquats et décents.
Les grands rassemblements de demandeurs d’asile et de réfugiés n’ont pas
donné de résultats positifs, mais ont
plutôt donné lieu à de nouvelles situations de vulnérabilité et de malaise. Les programmes d’accueil diffus,
déjà lancés dans différentes localités,
semblent au contraire faciliter la rencontre personnelle, permettre une
meilleure qualité des services et offrir
de plus grandes garanties de succès.
Protéger. Mon prédécesseur, le Pape
Benoît, a souligné que l’expérience
migratoire rend souvent les personnes
plus vulnérables à l’exploitation, à
l’abus et à la violence3. Nous parlons
de millions de travailleurs, hommes et
femmes, migrants — et parmi ceux-ci,
en particulier ceux qui sont en situation irrégulière — de réfugiés et de demandeurs d’asile, de victimes de la
traite. La défense de leurs droits inaliénables, la garantie des libertés fondamentales et le respect de leur dignité sont des devoirs dont personne ne
peut se dispenser. Protéger ces frères
et sœurs est un impératif moral à traduire en adoptant des instruments juridiques, internationaux et nationaux,
clairs et pertinents; en effectuant des
choix politiques justes et clairvoyants,
en préférant les processus constructifs,
sans doute plus lents, aux retours de
consensus immédiats; en mettant en
œuvre des programmes opportuns et
humanisants dans la lutte contre les
«trafiquants de chair humaine» qui
font du profit sur les malheurs d’autrui; en coordonnant les efforts de
tous les acteurs, parmi lesquels, vous
pouvez en être certains, il y aura toujours l’Eglise.
Promouvoir. Protéger ne suffit pas, il
faut promouvoir le développement
humain intégral des migrants, des déplacés et des réfugiés, qui «se réalise à
travers le soin que l’on porte aux
biens incommensurables de la justice,
de la paix et de la sauvegarde de la
création»4. Le développement, selon
la doctrine sociale de l’Eglise5, est un
droit indéniable de tout être humain.
En tant que tel, il doit être garanti en
assurant les conditions nécessaires
pour son exercice, aussi bien dans le
domaine individuel que dans le domaine social, en donnant à tous un
accès égal aux biens fondamentaux et
en offrant des possibilités de choix et
de croissance. Là aussi, une action
coordonnée et prévoyante de toutes
les forces en jeu est nécessaire: de la
communauté politique à la société civile, des organisations internationales
aux institutions religieuses. La promotion humaine des migrants et de leurs
familles commence par les communautés d’origine, là où doit être garanti, avec le droit de pouvoir émigrer,
également le droit de ne pas devoir
émigrer6, c’est-à-dire le droit de trouver dans sa patrie des conditions qui
permettent une réalisation digne de
l’existence. A cette fin, il faut encourager les efforts qui conduisent à la
mise en œuvre de programmes de
coopération internationale, détachés
de tout intérêt partisan, et de développement transnational dans lequels
les migrants sont impliqués comme
protagonistes.
Intégrer. L’intégration, qui n’est ni
assimilation ni incorporation, est un
processus bidirectionnel, qui se fonde
essentiellement sur la reconnaissance
mutuelle de la richesse culturelle de
l’autre: ce n’est pas l’aplatissement
d’une culture sur l’autre, ni un isolement réciproque, avec le risque de
«ghettoïsations» aussi néfastes que
dangereuses. En ce qui concerne celui
qui arrive et qui est tenu de ne pas se
fermer à la culture et aux traditions
du pays d’accueil, en respectant avant
tout ses lois, il ne faut absolument
pas négliger la dimension familiale du
processus d’intégration: c’est pourquoi je me sens le devoir de redire la
nécessité, plusieurs fois soulignée par
le Magistère7, de politiques visant à
favoriser et à privilégier les regroupements familiaux. En ce qui concerne
les populations autochtones, il faut
les aider en les sensibilisant de façon
adéquate et en les disposant de façon
positive aux processus d’intégration,
pas toujours simples et immédiats,
mais toujours essentiels et incontournables pour l’avenir. Il faut aussi pour
cela des programmes spécifiques qui
favorisent la rencontre significative
avec l’autre. Pour la communauté
chrétienne, ensuite, l’intégration pacifique de personnes de cultures différentes est, en quelque sorte, également un reflet de sa catholicité, étant
donné que l’unité, qui n’annule pas
les différences ethniques et culturelles,
constitue une dimension de la vie de
l’Eglise qui, dans l’Esprit de la Pentecôte, est ouverte à tous et désire embrasser chacun8.
Je crois que conjuguer ces quatre
verbes, à la première personne du singulier et à la première personne du
pluriel, représente aujourd’hui un devoir, un devoir à l’égard de frères et
sœurs qui, pour des raisons diverses,
sont forcés de quitter leur lieu d’origi-
ne: un devoir de justice, de civilisation
et de solidarité.
Avant tout, un devoir de justice. Les
inégalités économiques inacceptables,
qui empêchent de mettre en pratique
le principe de la destination universelle des biens de la terre, ne sont plus
durables. Nous sommes tous appelés
à entreprendre des processus de partage respectueux, responsable et inspiré
par les préceptes de la justice distributive. «Il est donc nécessaire de trouver
les moyens pour que tous puissent bénéficier des fruits de la terre, non seulement pour éviter que s’élargisse
l’écart entre celui qui a plus et celui
qui doit se contenter des miettes, mais
aussi et surtout en raison d’une exigence de justice, d’équité et de respect
envers tout être humain»9. Un petit
groupe d’individus ne peut contrôler
les ressources de la moitié du monde.
Des personnes et des peuples entiers
ne peuvent n’avoir le droit que de ramasser les miettes. Et personne ne
peut se sentir tranquille et dispensé
des impératifs moraux qui découlent
de la coresponsabilité dans la gestion
de la planète, une coresponsabilité
plusieurs fois rappelée par la communauté politique internationale, ainsi
que par le Magistère10. Cette coresponsabilité doit être interprétée en accord avec le principe de subsidiarité
«qui donne la liberté au développement des capacités présentes à tous
les niveaux, mais qui exige en même
temps plus de responsabilité pour le
bien commun de la part de celui qui
détient plus de pouvoir»11. Faire justice signifie également réconcilier l’histoire avec le présent mondialisé, sans
perpétuer les logiques d’exploitation
de personnes et de territoires, qui répondent à l’usage le plus cynique du
pages 6/7
abus, violence, mort — ne peuvent
qu’apparaître des sentiments spontanés d’empathie et de compassion.
«Où est ton frère?» (cf. Gn 4, 9): cette question, que Dieu pose à l’homme
depuis les origines, nous concerne, en
particulier, aujourd’hui, à l’égard de
nos frères et sœurs qui migrent: «Ce
n’est pas une question adressée aux
autres, c’est une question adressée à
moi, à toi, à chacun de nous»17. La solidarité naît précisément de la capacité
à comprendre les besoins de notre frère et de notre sœur en difficulté et de
s’en charger. C’est sur cela, en substance, que se fonde la valeur sacrée de
l’hospitalité présente dans les traditions religieuses. Pour nous, chrétiens,
l’hospitalité offerte à l’étranger qui a
besoin d’un refuge est offerte à Jésus
Christ lui-même, qui s’est identifié
avec l’étranger: «J’étais étranger et
vous m’avez accueilli» (Mt 25, 35).
C’est un devoir de solidarité de s’opposer à la culture du rejet et de réserver toute notre attention envers les
plus faibles, pauvres et vulnérables.
C’est pourquoi «un changement d’attitude envers les migrants et les réfugiés est nécessaire de la part de tous;
le passage d’une attitude de défense
et de peur, de désintérêt ou de marginalisation — qui, en fin de compte,
correspond à la “culture du rejet” — à
une attitude qui ait comme base la
plaît, n’oubliez pas de prier pour moi.
Merci.
1 Message pour la 100e journée mondiale
du migrant et du réfugié, 5 août 2013.
2 Discours au corps diplomatique accrédité près le Saint-Siège, 12 janvier 2015.
3 Cf. Benoît XVI, Message pour la 92e
journée mondiale du migrant et du réfugié, 18 octobre 2005.
4 Lett. ap. sous forme de Motu proprio Humanam progressionem, 17 août
2016.
5 Cf. Conseil pontifical justice et paix,
Compendium de la doctrine sociale de
l’Eglise, nn. 373-374.
6 Cf. Benoît XVI, Message pour la 99e
journée mondiale du migrant et du réfugié, 12 octobre 2012.
7 Cf. Jean-Paul II, Message pour la
journée mondiale des migrations, 15 août
1986.
8 Cf. Jean-Paul II, Message pour la
journée mondiale des migrations, 5 août
1987.
9 Message pour la 47e journée mondiale
de la paix, 8 décembre 2013, n. 9.
10 Cf. Conseil pontifical justice et
paix, Compendium de la doctrine sociale
de l’Eglise, nn. 9;163;189;406.
11 Lett. enc. Laudato si’, n. 196.
marché, pour augmenter le bien-être
d’un petit nombre. Comme l’a affirmé
le Pape Benoît, le processus de décolonisation a été retardé «aussi bien à
cause de nouvelles formes de colonialisme et de dépendance à l’égard
d’anciens comme de nouveaux pays
dominants, qu’en raison de graves irresponsabilités internes aux pays devenus indépendants»12. Il faut remédier à tout cela.
En second lieu, il y a un devoir de
civilisation. Notre engagement en faveur des migrants, des déplacés et des
réfugiés est une application
de ces principes et valeurs
d’accueil et de fraternité qui
constituent un patrimoine
commun d’humanité et de sagesse auquel puiser. Ces principes et ces valeurs ont été
codifiés au cours de l’histoire
dans la Déclaration universelToujours plus de paroisses et d’institutions ecclésiales en Allemagne accueillent les réfule des droits de l’homme,
giés, en les protégeant du rapatriement forcé. Et cela précisément tandis que fait rage dans
dans de nombreuses convenle pays le débat sur la nécessité des «expulsions rapides» de migrants sans droits d’asile.
tions et accords internatioPar rapport aux années précédentes, 2016 a vu une augmentation de ce que l’on appelle le
naux. «Tout migrant est une
Kirchenasyl, une sorte de droit d’asile dans les églises et les lieux de culte, qui en général,
personne humaine qui, en
est respecté par les forces de l’ordre allemandes. Les statistiques relatives à l’an dernier ne
tant que telle, possède des
sont pas encore officielles, mais on prévoit une augmentation supplémentaire pour 2017. Le
droits fondamentaux inaliénagroupe de travail ecclésial en matière d’asile a observé qu’à la mi-janvier de cette années,
bles qui doivent être respec323 refuges étaient déjà actifs pour un total de 547 personnes, dont 145 enfants. Il y a un
tés par tous et en toute ciran, suite à une initiative de l’Eglise catholique et de la communauté évangélique, 277 abris
Aujourd’hui
constance»13.
plus que jamais, il est nécesdans des bâtiments ecclésiaux accueillant 449 réfugiés avaient été enregistrés; en janvier
saire de réaffirmer le caractère
2015, on comptait 200 refuges abritant 359 réfugiés. Les lieux servant aux initiatives de recentral de la personne humaifuge temporaire sont des églises, des monastères, des couvents et des bâtiments diocésains.
ne, sans permettre que des
Les sièges ecclésiaux accomplissent un rôle de «sanctuaire», sur le modèle du New Sancconditions contingentes et actuary Movement des Etats-Unis, dans l’œuvre de protection temporaire des réfugiés, pour
cessoires, ainsi que le respect
les protéger du risque d’expulsion, et pour leur permettre d’obtenir au moins le droit pronécessaire de conditions buvisoire de séjourner en Allemagne. Il s’agit, pour la la majorité, de personnes qui fuient et
reaucratiques ou administratide demandeurs d’asile qui sont entrés dans l’Union européenne sur la base de la directive
ves, n’en obscurcissent la di«Dublin» et qui auraient donc dû quitter l’Allemagne.
gnité essentielle. Comme l’a
déclaré saint Jean-Paul II, «la
situation d'irrégularité juridique n’autorise pas à négliger la dignité du migrant, qui possède “culture de la rencontre”, seule capa- 12 Benoît XVI, Lett. enc. Caritas in vedes droits inaliénables, qui ne peuvent ble de construire un monde plus juste ritate, n. 33.
être ni violés ni ignorés»14. Par devoir et fraternel, un monde meilleur»18.
13 Ibid., n. 62.
de civilisation, il faut également reEn conclusion de cette réflexion, 14 Jean-Paul II, Message pour la jourtrouver la valeur de la fraternité qui se permettez-moi d’attirer votre attention
fonde sur la constitution relationnelle sur un groupe particulièrement vulné- née mondiale des migrations, 25 juillet
native de l’être humain: «La vive rable parmi les migrants, les déplacés 1995, n. 2.
conscience d’être en relation nous et les réfugiés que nous sommes appe- 15 Message pour la 47e journée mondiale
amène à voir et à traiter chaque per- lés à accueillir, protéger, promouvoir de la paix, 8 décembre 2013, n. 1.
sonne comme une vraie sœur et un et intégrer. Je veux parler des enfants 16 Cf. Benoît XVI, Discours aux particivrai frère; sans cela, la construction et des adolescents qui sont forcés de pants au congrès inter-académique
d’une société juste, d’une paix solide vivre loin de leur terre d’origine et «L’identité changeante de l’individu»,
et durable devient impossible»15. La coupés de leurs liens familiaux. C’est 28 janvier 2008.
fraternité est la manière la plus civile à eux que j’ai dédié le dernier messa- 17
Homélie sur le terrain de sport «Ared’entrer en relation avec la présence ge pour la journée mondiale du mide l’autre, qui ne menace pas mais in- grant et du réfugié, en soulignant na» à Salina, 8 juillet 2013.
terroge, réaffirme et enrichit notre qu’«il faut viser la protection, l’inté- 18 Message pour la 100e journée mondiale du migrant et du réfugié, 5 août
identité individuelle16.
gration et des solutions durables»19.
Il y a, enfin, un devoir de solidarité.
Je suis certain que ces deux jour- 2013.
Face aux tragédies qui «marquent au nées de travail apporteront des fruits 19 Message pour la 103e journée monfer rouge» la vie de tant de migrants abondants de bonnes œuvres. Je vous diale du migrant et du réfugié, 8 sepet de réfugiés — guerres, persécutions, assure de ma prière; et vous, s’il vous tembre 2016.
En Allemagne 300 églises
offrent un refuge aux migrants
L’OSSERVATORE ROMANO
page 8
jeudi 2 mars 2017, numéro 9
Paroles aux athlètes qui participent aux Special Olympics d’hiver
Pour un monde sans exclusion
«Ensemble, athlètes et assistants, vous nous montrez
qu’il n’existe pas d’obstacles ni de barrières qui ne
puissent être surmontés» en lançant un «message
pour un monde sans frontières et sans exclusion».
C’est ce qu’a dit le Pape François aux participants
aux prochains jeux mondiaux d’hiver Special
Olympics, reçus en audience dans la matinée du jeudi
16 février, dans la salle Clémentine.
Chers amis,
C’est avec plaisir que je vous souhaite la bienvenue et que je vous salue tous, ainsi que, à travers
vous, tous ceux qui participeront aux Jeux mondiaux d’hiver Special Olympics, qui se dérouleront
à Styrie, en Autriche, au mois de mars prochain.
Je remercie l’évêque de Graz-Seckau et le président de Special Olympics Autriche pour leurs aimables paroles.
Le sport est pour vous une passion, et vous
vous êtes préparés avec beaucoup d’application
aux compétitions, selon le serment de l’athlète
Special Olympics: «J’essaierai de gagner, mais si je
n’y arrive pas, je participerai avec courage et détermination». L’activité sportive fait du bien au
corps et à l’esprit, et vous permet d’améliorer la
qualité de votre vie. La préparation constante, qui
exige également des efforts et des sacrifices, vous
fait croître dans la patience et dans la persévérance, vous donne force et courage et vous fait acquérir des capacités qui autrement, demeureraient
cachées. Je suis certain que vous avez tous fait
cette expérience. Et ainsi, on se sent gratifiés et
également reconnus, valorisés dans ses capacités.
A la base de toute l’activité sportive il y a, dans
un certain sens, la joie: la joie de bouger, la joie
d’être ensemble, la joie pour la vie et les dons que
le Créateur nous fait chaque jour. En voyant un
beau sourire sur vos visages et le grand bonheur
dans vos yeux quand vous avez remporté de bons
résultats dans une compétition — et la victoire la
plus belle est précisément celle de se dépasser soimême — on se rend compte ce que signifie une
joie sincère et bien méritée! Et nous pouvons apprendre de vous à nous réjouir des petites choses
simples, et à nous réjouir ensemble.
En outre, le sport nous aide à diffuser la culture de la rencontre et de la solidarité. Ensemble,
athlètes et assistants, vous nous montrez qu’il
n’existe pas d’obstacles ni de barrières qui ne
puissent être surmontés. Vous êtes un signe d’espérance pour ceux qui s’engagent en vue d’une
société plus inclusive. Chaque vie est précieuse,
chaque personne est un don et l’inclusion enrichit
toutes les communautés et sociétés. Tel est votre
message pour le monde, pour un monde sans
frontières et sans exclusions!
Chers amis! Les jeux mondiaux d’hiver Special
Olympics seront un beau moment dans votre vie.
Vous serez, comme le dit la devise de cette édition, «Heartbeat for the world» (un cœur qui bat
pour le monde»). Je vous souhaite de passer
ensemble des journées joyeuses et de rencontrer
des amis du monde entier. Je vous confie à la
protection de la Très Sainte Vierge Marie et j’invoque sur vous, sur vos familles et sur tous les
participants la bénédiction divine. Et s’il vous
plaît, priez aussi pour moi. Merci!
Entretien avec le prédicateur des exercices spirituels à Ariccia
Entre saint Matthieu et Kafka
NICOLA GORI
Non seulement l’évangéliste Matthieu, mais également Franz Kafka,
Amos Oz et Emmanuel Carrère, et
aussi les familles, les pauvres et les
personnes qui souffrent, trouveront
une place dans les méditations des
exercices spirituels prêchés pour le
Pape et la Curie romaine du 5 au 10
mars. Le cours, qui se tiendra dans
la Maison du Divin Maître à Ariccia, sera tenu par le franciscain Giulio Michelini, des frères mineurs,
professeur d’exégèse néotestamentaire à l’institut de théologie d’Assise et
assistant du Mouvement ecclésial
d’engagement culturel (MEIC). «Passion, mort et résurrection de Jésus
selon Matthieu» est le thème choisi.
Le père Michelini est également engagé dans le domaine de la pastorale
biblique, des couples, et est responsable dans le diocèse de Pérouse
- Città della Pieve de la formation
des candidats au diaconat permanent. Mais c’est avant tout un spécialiste de Matthieu, ayant à son actif un commentaire de son Evangile
et une étude de la Passion. Dans cet
entretien avec L’Osservatore Romano, il anticipe certains thèmes du
cours d’exercices spirituels qu’il tiendra devant le Pape.
Pourquoi avoir choisi ce thème?
Le début du Carême nous projette
déjà vers la Semaine sainte, au cours
de la laquelle nous célébrons le
cœur du mystère chrétien, c’est-à-dire la Passion, la mort et la résurrection de Jésus. Cela est un premier
motif. D’autre part, j’ai été formé,
j’ai travaillé et j’ai approfondi les
études sur la Passion selon Matthieu. J’ai donc considéré que j’étais
en mesure d’affronter le texte sur lequel j’ai beaucoup concentré mon
attention et sur lequel je peux dire
quelque chose d’utile.
D’où naît votre prédilection
l’Evangile de Matthieu?
pour
La première raison est que j’ai
consacré mon doctorat à Matthieu.
De plus, cette année, l’année liturgique propose la lecture de son
Evangile, qui est celui de Pierre et
de l’Eglise. C’est le seul qui connaisse le terme ecclesìa. En outre, quand
je parlerai, j’aurai devant moi les
pasteurs de l’Eglise et j’ai donc pensé choisir un contexte qui permette
d’écouter précisément Pierre. Considérant également que l’introduction
à tout le cours d’exercices se déroulera dimanche et portera sur deux
points: demeurer avec Jésus et demeurer avec Pierre.
Comment avez-vous accueilli la demande du Pape?
Qu’y aura-t-il d’actuel dans vos méditations?
Je l’ai accueillie avec un sens de
responsabilité, de joie, et aussi avec
un peu de préoccupation. J’ai compris qu’il s’agissait de quelque chose
d’important et j’avoue qu’avant d’accepter, j’ai consulté mon directeur
spirituel.
Beaucoup de choses. Je pense à la
méditation que je ferai sur l’épouse
de Pilate. Un couple d’époux avec
lequel je collabore depuis de nombreuses années m’a aidé à la préparer: les époux Gillini-Zattoni. Cela
pour dire que dans les réflexions en-
treront également en jeu
le thème de la famille.
Puis celui des pauvres,
parce qu’au début de la
Passion, dans la page de
l’onction de Béthanie,
Jésus dit: «Vous aurez
toujours les pauvres avec
vous». Puis aussi les
personnes qui souffrent,
James Tissot, «Le message de la femme de Pilate»
comme Jésus au Gethsémani: nous pouvons dire
qu’en ce lieu, se trouvent tous ceux ques et archéologiques de Terre
qui vivent une épreuve aujourd’hui Sainte, dont nous franciscains somet qui, comme le Christ, ont parfois mes les gardiens. Pour cela, j’espère
des difficultés à suivre la volonté de apporter un peu de simplicité. Je vis
Dieu. Les thèmes choisis pour les dans la province de Pérouse, dans
méditations sont eux aussi représen- un couvent que le Pape François aptatifs, ils ne se limiteront pas aux pellerait «de périphérie». Nous,
thèmes évangéliques: je parlerai, en- franciscains, avons également cette
tre autres, d’œuvres comme Le dimension de contact avec les gens
Royaume d’Emmanuel Carrère, Judas et avec le peuple de Dieu. Je voud’Amos Oz et La métamorphose de drais précisément faciliter cette
Franz Kafka, que j’utiliserai dans la proximité à travers mes méditations.
dernière méditation sur la résurrection, dans laquelle je parlerai du ré- Quel effet cela vous a-t-il fait que,
veil de Jésus. Le choix de Sophie de pour la première fois dans l’histoire de
William Styron — dont Alan Pakula
l’Eglise, un Pape ait choisi le nom de
a tiré son film avec Meryl Streep —
François?
est un livre très important qui me
servira pour parler de Jésus et BaJ’ai immédiatement compris qu’il
rabbas.
s’agissait d’un signe pour marcher
derrière Pierre, qui a choisi ainsi
Dans quelle mesure le fait d’être fran- d’annoncer le Christ non seulement
ciscain influence-t-il les méditations?
à travers le magistère, mais égaleJe crois que cela a une grande in- ment à travers les gestes et un style
fluence, parce ce que je me suis pré- de vie proche de celui de François
paré à Capharnaüm. Mes frères d’Assise. Nous, franciscains, avons
m’ont accueilli dans la ville de Jésus, tous été honorés de ce choix, et
comme on le lit dans l’Evangile se- nous avons compris qu’il s’agit
lon Matthieu. Dans ces méditations, d’une opportunité pour l’Eglise
C’est-à-dire
qu’il
je ferai constamment référence à la d’aujourd’hui.
vie de Jésus en Galilée, aux événe- s’agit d’annoncer l’Evangile comme
ments qui sont encore visibles égale- Jésus le faisait et comme François le
ment à travers les mémoires histori- fait: c’est-à-dire au milieu des gens.
numéro 9, jeudi 2 mars 2017
Mardi
14 février
Des agneaux ou des loups
En la fête liturgique des saints Cyrille et Méthode, «hérauts courageux
de l’Evangile» qui «ont tout risqué»
et «rendue l’Europe plus forte», le
Pape a réfléchi sur «le caractère missionnaire de l’Eglise» et sur les caractéristiques que doit avoir celui qui
est «envoyé proclamer la parole de
Dieu». La méditation du Pape s’est
inspirée de la prière de la collecte du
jour, dans laquelle on demande «que
tous les peuples — tous les hommes!
— accueillent la parole de Dieu et
forment le saint peuple fidèle de
Dieu». Et si pour «former le peuple», il faut «accueillir la parole»,
alors «il y a besoin de semeurs de
parole, de missionnaires, de véritables hérauts». Comme les saints Cyrille et Méthode. Dans les lectures
proposées par la liturgie, on parle
également de missionnarité, avec Jésus qui envoie les disciples (Luc 10,
1-9) et avec Paul et Barnabé qui sont
envoyés (Actes des apôtres 13, 4649). Mais quelle doit être «la personnalité d’un envoyé, de celui qui
est envoyé pour proclamer la parole
de Dieu?». Trois caractéristiques
sont apparues. Tout d’abord, «on dit
à propos de Paul et Barnabé qu’ils
parlaient avec franchise». Donc, on
doit apporter la Parole de Dieu
«avec franchise, c’est-à-dire ouvertement; également avec force, avec
courage». Il arrive en effet que «la
personne qui n’a pas de courage sera
incapable de former le peuple de
Dieu», car «seule la Parole de Dieu
proclamée avec cette franchise, avec
ce courage, est capable de former le
peuple de Dieu». La deuxième caractéristique de l’envoyé ressort du
passage évangélique. Dans celui-ci,
Jésus dit: «La moisson est abondante, mais les ouvriers sont peu nombreux. Priez le Maître de la moisson
pour qu’il envoie des ouvriers à sa
moisson». «La Parole de Dieu doit
être proclamée par la prière» et cela
doit «toujours» être fait. Enfin, dans
l’Evangile apparaît «une troisième
caractéristique qui est intéressante».
On lit: «Voilà, je vous envoie comme des agneaux au milieu des
loups». Qu’est-ce que cela signifie?
«Le véritable prédicateur est celui
qui se sait faible, qui sait qu’il ne
peut pas se défendre de lui-même».
L’envoyé «au milieu des loups»
pourrait objecter: «Mais, Seigneur,
pour qu’ils me mangent?». La réponse est: «Va! C’est là le chemin».
A cet égard, François a rappelé une
«réflexion très profonde» de Jean
Chrystostome: «Mais si tu ne vas
pas comme un agneau, mais que tu
vas comme un loup parmi les loups,
le Seigneur ne te protège pas: défends-toi seul». «Quand celui qui
doit apporter la Parole de Dieu le
fait comme quelqu’un sûr de lui-même et non comme un agneau, il finit
mal». Si, en revanche, il le fait
«comme un agneau, ce sera le Seigneur qui défendra les agneaux.
«Ainsi, les grands hérauts qui ont
semé et qui ont aidé à faire grandir
l’Eglise dans le monde, ont été des
hommes courageux, de prière et
humble». Du reste, l’invitation est
L’OSSERVATORE ROMANO
page 9
Messes
à Sainte-Marthe
donc celle de prier les saints Cyrille
et Méthode, «patrons d’Europe, hérauts de l’Evangile, pour qu’ils nous
aident à proclamer la Parole de Dieu
avec courage, en prière et avec humilité».
Jeudi
16 février
Gardiens de la paix
«La guerre est finie»: le cri joyeux
de la voisine à Buenos Aires, qui
prend sa mère Regina dans ses bras
a marqué et ému si profondément le
petit Jorge Mario que le souvenir en
est encore très vivant dans sa mémoire. Le cri «la guerre est finie»
devrait être répété précisément aujourd’hui par toutes les personnes
pour connaître enfin la paix dans le
cœur, mais également dans sa famille, dans son quartier, sur le lieu de
travail, et petit à petit, jusqu’au
monde entier. Parce que les conflits
commencent par les petites choses et
débouchent sur «le trafic d’armes»,
sur les «bombardements d’écoles et
d’hôpitaux» pour le pouvoir et «un
morceau de terre en plus». La paix
est donc un travail artisanal que chacun de nous est appelé à édifier
chaque jour et également à invoquer
par la prière qui n’est jamais «une
formalité». Dans la première lecture,
le passage tiré du livre de la Genèse
(9, 1-3) et également dans le passage
de Marc (8, 27-33), «il y a trois
mots, trois figures, trois images qui
nous aideront à réfléchir, à penser et
à mieux comprendre ce que Jésus
explique dans l’Evangile à ses disciples: l’image de la colombe, de l’arcen-ciel et de l’alliance ». En effet,
«après le déluge, la première image
est celle de la colombe qui, après
avoir tournoyé plusieurs fois, revient
à la fin avec une jeune branche
d’olivier dans le bec». La colombe,
avec la branche d’olivier dans le bec,
est un signe de paix, c’est le message
de Dieu à l’humanité». La «deuxième figure» est «l’arc-en-ciel». «C’est
le signe de l’alliance que je place —
dit le Seigneur — entre vous et moi
pour toutes les générations futures.
Je place mon arc sur les nuages»,
afin qu’il soit «le signe, le souvenir
de cette paix qui sera alliance». «Le
troisième mot est l’alliance». «Dieu
promet: “Je ne détruirai jamais, jamais, je veux la paix, je fais cette alliance avec vous”, l’alliance de la
paix». «La colombe et l’arc-en-ciel
sont fragiles». « L’arc-en-ciel est
beau après la tempête, mais ensuite
vient un nuage, il disparaît: c’est un
signe éphémère». Même «la colombe est fragile parce qu’il suffit que
passe un rapace affamé». En revanche, «l’alliance que Dieu fait est forte, mais nous la recevons, nous l’acceptons avec faiblesse». Ainsi, «Dieu
fait la paix avec nous, mais il n’est
pas facile de sauvegarder la paix:
c’est un travail de tous les jours».
«Il y a une chose de l’alliance, un
mot qui se répète, le “sang”». Nous
sommes gardiens de nos frères et
lorsqu’il y a effusion de sang, il y a
péché, et Dieu nous demandera des
comptes». Aujourd’hui, «dans le
monde, il y a effusion de sang, aujourd’hui, le monde est en guerre:
de nombreux frères et sœurs meurent, même des innocents, parce que
les grands et les puissants veulent un
morceau de terre en plus, veulent un
peu de pouvoir ou veulent gagner
un peu plus avec le trafic d’armes».
Mais «la parole du Seigneur est claire: De votre sang, c’est-à-dire de votre vie, je demanderai compte; j’en
demanderai compte à tout être vivant». A ce propos, le Pape a suggéré la ligne à suivre pour un examen
de conscience: «La question que je
poserais aujourd’hui est: comment
est-ce que je protège la colombe?
Que fais-je afin que l’arc-en-ciel soit
toujours un guide ? Que fais-je afin
que le sang ne soit plus versé dans
le monde?». Une question cruciale,
parce que «la guerre commence et
finit là». Oui, «nous voyons les
nouvelles dans les journaux ou à la
télévision: aujourd’hui, tant de gens
meurent et cette semence de guerre
qui crée l’envie, la jalousie, la cupidité dans mon cœur, est la même —
qui a grandi, est devenu un arbre —
que la bombe qui tombe sur un hôpital, sur une école et qui tue des
enfants, c’est la même!». Parce que
véritablement, «la déclaration de
guerre commence là, en chacun de
nous». D’où l’importance de se poser la question: «Comment est-ce
que je préserve la paix dans mon
cœur, au plus profond de moi, dans
ma famille?». Parce qu’il s’agit «non
seulement de sauvegarder la paix»,
mais aussi de «l’édifier avec les
mains, de façon artisanale, tous les
jours. Ainsi, nous réussirons à la faire dans le monde entier». « La colombe, l’arc-en-ciel, le sang». Il n’y
a qu’un sang qui ait été versé une
fois pour toutes. C’est précisément
«le sang du Christ qui est celui qui
fait la paix». En conclusion, le Pape
a prié pour «que le Seigneur nous
donne la grâce de pouvoir dire: “la
guerre est finie” en pleurant».
Mardi
21 février
Mondanité et honte
L’effort quotidien de tous les chrétiens en cherchant à vaincre la «tentation de la mondanité», de «se sentir plus grands que les autres», a été
au cœur de la méditation du Pape.
Une tentation inévitable, a expliqué
le Pape, en s’inspirant de la liturgie
de la parole. Tout d’abord de la lecture tirée du livre du Siracide (2, 113), où il est écrit: «Mon fils, si tu
prétends servir le Seigneur, préparetoi à l’épreuve». La confirmation se
trouve dans l’Evangile de Marc (9,
30-37), dans lequel on parle de Jésus
qui «allait avec les disciples de manière décidée, résolument vers Jérusalem pour accomplir sa mission»,
c’est-à-dire celle «de faire la volonté
du Père». Jésus anticipait aux disciples ce qui lui serait arrivé à Jérusalem: «Le Fils de l’homme est livré
aux mains des hommes et ils le tue-
ront». Et aussi: «Quand il aura été
tué, après trois jours il ressuscitera».
Pourtant les disciples «ne comprenaient pas ces paroles et avaient
crainte de l’interroger, d’aller au-delà, dans les explications», au point
qu’ils disaient: «Arrêtons-nous ici,
cela vaut mieux». Les difficultés à
comprendre des disciples s’éclaircissent encore mieux en avançant dans
la lecture. En effet, «quand ils arrivèrent à Capharnaüm, Jésus leur demanda: “De quoi discutiez-vous en
chemin?”». Et ici aussi, ces derniers
«se taisaient». Mais cette fois-ci, ils
se taisaient «à cause de la honte».
En effet, «ils avaient discuté entre
eux de qui était le plus grand». Ils
avaient «la tentation de la mondanité». Mais, ce n’était pas une tentation qui appartenait à eux seuls:
«Depuis le moment où l’Eglise est
Eglise jusqu’à aujourd’hui, cela s’est
produit, se produit et se produira».
Cela arrive, par exemple, «dans les
paroisses» où il y a toujours des
«luttes». La tentation de la mondanité à partir de laquelle commence
«la chaîne des péchés», comme
«parler mal de son prochain» ou les
commérages. «Parmi nous aussi, les
évêques, il arrive la même chose: la
mondanité vient comme une tentation». Et ainsi, il arrive qu’un
évêque dise: «Je suis dans ce diocèse, mais je regarde celui qui est plus
important», et il agit pour faire des
pressions, pour chercher des influences. En résumé, «la mission est servir le Seigneur, mais ensuite le désir
véritable, très souvent, nous pousse
vers la route de la mondanité pour
être plus importants». Il peut ensuite y avoir la déception, comme cela
a été le cas pour les disciples de Jésus qui «se taisaient tout d’abord
par crainte, puis qui se taisaient par
honte». Le Pape l’a définie comme
la «sainte honte!». Le critère de
choix pour nos actions, face à certaines tentations, est expliqué par Jésus: «S’étant assis, il leur dit: «Si
quelqu’un veut être le premier, il sera le dernier de tous et le serviteur
de tous» et, ayant pris un enfant, il
ajouta: «Devenez comme lui». Le
Christ «inverse tout. La gloire et la
croix, la grandeur et l’enfant...». Ce
passage de l’Evangile «nous conduit
à prier pour l’Eglise, à prier pour
nous tous, afin que le Seigneur nous
défende des ambitions, du sentiment
mondain de se sentir plus grands
que les autres». Que le Seigneur
«nous donne la grâce de la honte».
Mais également, «qu’il nous donne
la grâce de la simplicité d’un enfant», de comprendre l’importance
de la «route du service» et, à la fin
d’une vie de service, de savoir dire:
«Je suis un serviteur inutile».
page 10
L’OSSERVATORE ROMANO
jeudi 2 mars 2017, numéro 9
L’étendard d’Ur retrouvé dans une tombe
du site (2600-2400 av. J.-C.)
GIOVANNI BATTISTA RE
ans la perspective du grand
jubilé de l’an 2000, JeanPaul II désirait ardemment aller prier sur les lieux les plus liés à
l’histoire de notre salut, qui atteint
son sommet dans l’incarnation du
Verbe de Dieu. Il aspirait en particulier à se rendre à Ur des Chaldéens, patrie d’Abraham, sur le Sinaï, où Dieu donna les commandements à Moïse et établit son alliance
avec l’humanité, sur le mont Nebo,
d’où Moïse lui-même vit la terre
promise, et en Terre Sainte: Nazareth, Bethléem et Jérusalem. Le Pape eut la joie de visiter, lors de deux
voyages accomplis respectivement en
février et en mars 2000, tous les
lieux venant d’être rappelés, à l’exception du premier, c’est-à-dire Ur
des Chaldéens, qui, dans le projet
papal, représentait précisément le
point de départ, à effectuer en 1999,
séparément des autres.
Comme on le sait, Ur des Chaldéens, située au sud de l’Irak à
quinze kilomètres de Nassiriya, dans
une zone presque déserte proche du
delta de l’Euphrate, est le lieu d’où,
selon le récit biblique, Abraham partit, accueillant la voix de Dieu. Il
n’existe aujourd’hui de l’antique Ur
que des vestiges archéologiques, que
j’ai visités en 1969. Je me rappelle
que dans la partie sud de cette localité — le reste du palais royal et des
temples sont au centre et dans la
partie nord — se trouvent les traces
d’un quartier habité et, parmi ces
ruines, me furent indiquées les fondations d’une maison que l’archéologue anglais Leonard Wooley, directeur des fouilles à Ur entre 1922 et
1930, avait identifiée comme la «maison d’Abraham». A l’époque du patriarche biblique, Ur était le centre
de l’antique civilisation sumérienne,
l’une des premières véritables ville
du monde.
Abraham, avec sa femme Sarah et
son fils Isaac, obéissant à l’appel de
Dieu, partit de cette ville vers la
«terre promise» pour marquer le début d’un nouveau peuple: «Quitte
ton pays, ta parenté et la maison de
ton père, pour le pays que je t’indiquerai. Je ferai de toi un grand peuple, je te bénirai, je magnifierai ton
nom; sois une bénédiction!» (Genèse, 12, 1-2), lui avait dit cette voix intérieure. Et Abraham quitta sa maison et partit, comme le Seigneur le
lui avait ordonné, accompagné par
la promesse d’une grande descendance: «Lève les yeux au ciel et dénombre les étoiles si tu peux les dénombrer. Telle sera ta postérité» (15,
5). Abraham a cru avec confiance —
«avec espérance contre toute espérance» (Rm, 4, 18) écrit l’apôtre
Paul — et il est devenu le prototype
du croyant, en raison de sa foi inébranlable dans la parole de Dieu.
C’est précisément en raison de ce
que le patriarche Abraham représente pour nous chrétiens, que JeanPaul II tenait beaucoup à visiter Ur,
afin de prier en ce lieu riche de souvenirs historiques et pour pouvoir
réfléchir sur cette terre sur les événements et sur l’extraordinaire témoignage de foi en Dieu de ce grand
personnage biblique, également très
vénéré par les juifs et les musulmans.
D
Un voyage manqué de Jean-Paul
II
Sur la terre d’Abraham
Cette première étape, rêvée et désirée, se présentait cependant très
difficile en ces années-là. En 1990,
en effet, l’Irak avait militairement
envahi le Koweït en l’annexant à son
propre territoire. En réaction, se forma immédiatement une grande coalition internationale, agissant sur
mandat des Nations unies et guidée
par les Etats-Unis, qui libéra le Koweït, en obligeant Saddam Hussein
à rentrer dans les frontières de son
Etat. Mais cette intervention des
troupes irakiennes avait suscité
préoccupation et méfiance dans le
monde à l’égard de Saddam Hussein. On craignait en outre que
l’Irak n’ait un programme nucléaire
secret et qu’il ne possède des armes
chimiques. Etant donné que le leader irakien n’avait pas voulu accepter un contrôle international en vue
d’une vérification de la part d’inspecteurs, l’Organisation des Nations
unies (ONU) décréta un embargo sur
l’Irak qui interdisait l’atterrissage à
Bagdad de tout avion.
Rejoindre Ur des Chaldéens semblait donc un rêve irréalisable. Mais
en raison de la grande signification
religieuse de ce lieu, Jean-Paul II
voulut que l’on approfondisse la
question. Comme premier pas, il
chargea le cardinal Roger Etchegaray d’aller directement vérifier l’état
des choses avec les autorités irakiennes. Le 8 juin 1998, le représentant
papal vola jusqu’à Amman, en Jordanie, et de là, il rejoignit Bagdad
en voiture, où il rencontra le vicepremier ministre Tareq Aziz, puis le
ministre des affaires étrangères Mohammed Said al-Sajaf et le ministre
pour les affaires religieuses. Il fut dit
au cardinal que l’on ne voyait pas de
difficultés pour la visite et que le
président Saddam Hussein aurait
volontiers salué le Pape en terre irakienne. A son tour, le cardinal
Etchegaray avait expliqué le sens
que le Pape entendait donner au pèlerinage à Ur des Chaldéens, qui aurait eu un caractère religieux et de
prière, sans la présence d’autorités
civiles.
Quelques jours plus tard, le cardinal Sodano, secrétaire d’Etat, se
trouvant à New York pour une rencontre prévue depuis longtemps, en
profita pour parler des difficultés de
l’embargo et de la no-fly-zone avec
le secrétaire général des Nations
unies, Kofi Annan. Plus tard, la se-
crétairerie d’Etat prit également contact avec Peter van Walsum, président du Comité pour les sanctions
contre l’Irak. La conclusion fut que,
le moment venu, il aurait été suffisant de communiquer officiellement
à cet organisme le programme du
voyage papal, exclusivement à caractère religieux, en précisant le jour,
les horaires, les vols et l’aéroport
(celui de Bagdad). L’embargo aurait
été levé le temps du pèlerinage du
Pape et de sa suite.
Après ces réponses favorables,
Jean-Paul II décida d’informer les
Etats-Unis du projet, en illustrant
bien la finalité strictement religieuse
du voyage. En réponse, Madeleine
Albaright, secrétaire d’Etat américain, envoya à Rome une délégation
de trois personnes (Bruce Reidel,
conseiller du président Clinton pour
les questions de sécurité, Ann Korky,
du département d’Etat, et Bruce
Bork, du Service national de renseignements) pour «informer le SaintSiège sur la situation en Irak» et
présenter les difficultés que les
Etats-Unis et la Grande-Bretagne
entrevoyaient pour le projet du Pape.
La délégation fut reçue le 4 juin
1999 par Mgr Celestino Migliore,
sous-secrétaire pour les relations
avec les Etats, qui écouta leur vision
du problème et souligna qu’il s’agissait d’un voyage à caractère exclusivement religieux, dans un lieu riche
de signification religieuse. Le prélat
précisa en outre qu’au cours de ce
voyage, la rencontre du Pape avec
Saddam Hussein était inévitable,
mais que cela n’aurait en rien signifié l’appui de sa politique, mais au
contraire, aurait pu être une occasion pour parler et éclaircir certaines
questions avec le président. Quelques semaines plus tard se présenta
également à la secrétairerie d’Etat
Thomas Pickering, sous-secrétaire
du département d’Etat, et le thème
principal de la visite du diplomate
américain fut le pèlerinage papal en
Irak, et ce dernier exprima la crainte
que ce voyage ne renforce Saddam
Hussein.
Jean-Paul II, qui avait déjà prévu
cette contrariété des Etats-Unis, décida quand même d’aller de l’avant,
son voyage étant motivé par de sérieuses raisons religieuses en préparation au jubilé de l’an 2000.
Jusqu’au mois de mai 1999, tout
semblait procéder de manière favorable à la visite en Irak. Le ministre
des affaires étrangères, en rencontrant le nonce, lui avait dit entre autres qu’on l’on aurait eu plaisir à accueillir le Pape dans la Guest House
présidentielle destinée aux chefs
d’Etats et aux hôtes illustres. Ce à
quoi le nonce répondit que la tradition était qu’au cours de ses voyages, le Pape loge dans la résidence
de la nonciature et que l’on n’admettait pas d’exceptions.
Le 29 juin 1999, le Pape publia en
préparation au grand jubilé, une lettre pour illustrer la signification du
pèlerinage qu’il entendait faire dans
les principaux lieux liés à l’histoire
du salut et il consacrait deux pages
entières à Ur des Chaldéens. Un
groupe de sept intellectuels irakiens
critiqua le document pontifical dans
une lettre ouverte, en soulignant
l’importance d’Abraham pour l’islam
et en soulignant que la vision
d’Abraham dans le Coran, où il est
nommé 69 fois, est différente de celle du Pape. Le texte irakien ne suscita pas de surprise, parce que tout le
monde savait que les deux conceptions, chrétiennes et musulmanes, se
fondent sur des points de vue différents. De même qu’il était évident
que la perspective du Pape était la
perspective biblique et pas celle du
Coran. La lettre ne sembla pas troubler le climat d’attente: il s’agissait
de l’initiative privée de certains intellectuels qui exprimaient leur pensée
sur Abraham.
Mais au moment de définir les
points concrets du programme, le
gouvernement commença à renvoyer
le choix de la date à laquelle l’organisateur des voyages papaux, le jésuite Roberto Tucci, et ses collaborateurs auraient pu se rendre à Bagdad
pour décider les divers points du déroulement de la visite. Ce retard ne
manqua pas de surprendre, car le
pèlerinage était prévu du 1er au 3 décembre 1999.
Finalement, le 21 novembre, le père Tucci et ses collaborateurs furent
reçus au ministère des affaires étrangères par le sous-secrétaire, accompagné par le chef du protocole et
par un directeur général du ministère. Le haut fonctionnaire, au terme
d’un long entretien, communiqua
SUITE À LA PAGE 11
L’OSSERVATORE ROMANO
numéro 9, jeudi 2 mars 2017
page 11
Collège épiscopal
Le Saint-Père a nommé:
8 février
le père TIMOTHY HARRIS, du clergé
de l’archidiocèse de Brisbane (Australie), jusqu’à présent curé de «Surfer’s Paradise» et doyen de la zone
de la côte sud du même archidiocèse: évêque de Townsville (Australie).
Né à Brisbane (Australie) le 29
octobre 1962, il a étudié au Saint Joseph’s College di Nudgee. Avant
d’entrer au séminaire régional
Pie XII en 1985, il a travaillé dans
une banque comme responsable du
personnel et des relations avec les
clients. Ordonné prêtre le 18 novembre 1992, il a exercé son ministère
comme assistant dans les paroisses
de Grovely et Caboolture, puis il est
devenu curé de Graceville et s’est
occupé de l’union de sa paroisse
avec la proche paroisse de Corinda.
Il a également été membre du
conseil presbytéral et du «clergy appointments advisory panel». En
2010, il a été transféré comme curé à
«Surfer’s Paradise» et il était jusqu’à
présent doyen de la zone de la côte
sud de l’archidiocèse de Brisbane.
nait alors le territoire correspondant.
Il a ensuite été vicaire à Wittenburg
et Neubrandenburg, avant de devenir curé de Sankt Norbert à Friedland en 1985. En 1990, il a été
transféré à la paroisse de Sankt Elisabeth à Hagenow puis, en 1996, à
la Christusgemeinde de Rostock.
Depuis 2009, il était prévôt de Sankt
Anna à Schwerin. En 2015, il a également été nommé chanoine non-résident du chapitre métropolitain de
Hambourg.
10 février
le père GIOVANNI SALONIA, O.F.M.
CAP., jusqu’à présent responsable de
la formation permanente pour la
province capucine de Syracuse (Italie): évêque auxiliaire de Palerme
(Italie), lui assignant le siège titulaire de Butrinto.
Né à Raguse (Italie) le 27 juillet
1947, il est entré chez les frères capucins de la province de Syracuse le 29
septembre 1962. Il a suivi ses études
dans les instituts internes de l’ordre.
Il a émis ses vœux temporaires le 4
octobre 1963 et ses vœux perpétuels
le 1er novembre 1968. Il a été ordonné prêtre le 3 juillet 1971. Il a obtenu
une licence en théologie, appliquée à
la spiritualité, à l’Antonianum de
Rome; une licence en sciences de
l’éducation à l’université pontificale
salésienne; un spécialisation en psychothérapie de la Gestalt au Gestalt
Training Center de San Diego en
Californie. Au sein de son ordre, il a
été directeur des étudiants capucins
à Raguse (1978-1981); définiteur provincial (1980-1986); vicaire provincial
(1989-1991);
ministre
provincial
(1992-2001); supérieur et maître des
post-novices à Modica (2001-2007);
de nouveau ministre provincial
(2007-2010). Il était jusqu’à présent
responsable de la formation permanente pour la province capucine de
Syracuse. Il a également été professeur d’assistance pastorale dans divers séminaires; professeur de psychologie et de Pastoral Counseling à
la faculté pontificale de théologie de
Sicile (Palerme); co-directeur de
l’école post-universitaire de spécialisation en psychothérapie de la Gestalt Human Center Communication
Italy (Raguse-Rome-Venise); professeur à l’université pontificale Antonianum; collaborateur du cours sur
la pastorale familiale à l’université
pontificale grégorienne; professeur à
l’institut de théologie San Paolo de
Catane; professeur de psychologie
sociale à la LUMSA de Palerme; directeur du planning familial Oasi
Cana de Palermo; directeur la revue
internationale en ligne GTK; directeur des masters universitaires de second niveau en Pastoral Counseling.
13 février
le père YUNAN TOMBE TRILLE KUKU ANDALI, du clergé de El Obeid
(Soudan), recteur du grand séminaire Saint-Paul à Juba: évêque d’El
Obeid (Soudan).
Né le 1er janvier 1964 à Tojoro,
dans la région de Nuba Mountains,
diocèse d’El Obeid (Soudan), il a
accompli ses études secondaires à la
Comboni Junior School à El Obeid,
puis a suivi des études de philosophie à Juba et de théologie à Khartoum, où il a obtenu le baccalauréat.
Ordonné prêtre le 7 avril 1991, il a
été collaborateur paroissial à El Nahud, Nayala, El Fasher et Kadaguli
(1991-1995); recteur du petit séminaire d’El Obeid (1995-2002); vicaire
général du diocèse (1997-2002).
Après des études de licence et de
doctorat en droit canonique à l’université catholique de Nairobi, au Kenya (2002-2009), il a été curé de la
All Saints Parish à Saraf Jamus
(2009-2012). Depuis 2012, il était
recteur du séminaire interdiocésain
Saint-Paul à Juba.
9 février
Mgr HORST EBERLEIN, du clergé de
l’archidiocèse de Hambourg (République fédérale d’Allemagne), jusqu’à présent prévôt de Sankt Anna à
Schwerin et chanoine non-résident
du chapitre métropolitain: évêque
auxiliaire de l’archidiocèse de Hambourg (République fédérale d’Allemagne), lui assignant le siège titulaire épiscopal de Tisedi.
Né le 25 octobre 1950 à Walsleben/Altmark, aujourd’hui appartenant à l’archidiocèse de Berlin (République fédérale d’Allemagne), il a
suivi des études de philosophie et de
théologie à Erfurt. Il a été ordonné
prêtre le 16 avril 1977 à Waren/Müritz, dans le diocèse actuel de Hambourg, et a été incardiné dans le diocèse d’Osnabrück, auquel apparte-
Envoyé spécial
Le Saint-Père a nommé:
18 février
S.Em. le cardinal GIUSEPPE BERTELLO, président du gouvernorat de
l’Etat de la Cité du Vatican: envoyé
spécial aux célébrations du 40e anniversaire de l’établissement des relations diplomatiques entre la République du Ghana et le Saint-Siège,
ainsi que du 60e anniversaire de l’indépendance de la même République, en programme à Accra du 3
au 6 mars 2017.
L’OSSERVATORE ROMANO
EDITION HEBDOMADAIRE
Unicuique suum
EN LANGUE FRANÇAISE
Non praevalebunt
Un voyage manqué de Jean-Paul
SUITE DE LA PAGE 10
qu’il aurait donné une réponse dans
les deux jours, mais il informa
ensuite que la question demandait
une étude supplémentaire et que la
décision aurait été ensuite communiquée à travers la nonciature. Ce
retard renforça bien évidemment le
soupçon que Saddam Hussein était
en train de changer d’idée.
Le 9 décembre 1999, l’ambassadeur d’Irak près le Saint-Siège rencontra le substitut de la secrétairerie
d’Etat et communiqua verbalement
que, dans la «situation anormale»
dans laquelle se trouvait l’Irak, «le
voyage du Pape devait être renvoyé
jusqu’au au moment où les circonstances le permettraient».
Pourquoi Saddam Hussein changea-t-il d’idée? Eut-il la crainte de
ne pas réussir à contrôler la situation interne, à cause de la condition
de souffrance de la population, en
raison des difficultés économiques
causées par l’embargo imposé par
les Nations unies? Craignait-il que
cette visite du Pape en terre irakienne ne le pousse ensuite à accepter
l’humiliation du contrôle d’inspecteurs de l’Onu sur l’existence possible d’armes chimiques et de programmes nucléaires secrets? Fut-il
dissuadé par quelque chef religieux
musulman? Ce sont des questions
auxquelles il n’est pas possible
d’apporter une réponse, car l’am-
GIOVANNI MARIA VIAN
directeur
Giuseppe Fiorentino
vice-directeur
Jean-Michel Coulet
rédacteur en chef de l’édition
Cité du Vatican
[email protected]
www.osservatoreromano.va
Rédaction
bassadeur se limita à dire que le
président Saddam Hussein n’entendait pas annuler la visite, mais seulement la renvoyer dans le temps.
La réponse, quelques semaines
avant le début du jubilé de l’an
2000, ferma définitivement la porte
à la réalisation du voyage. JeanPaul II en prit acte avec la sérénité
qui le distinguait et il décida de
consacrer à Abraham les audiences
générales du 16 et du 23 février,
pendant les premières semaines de
l’année sainte, illustrant ce que le
personnage
biblique
représente
pour les chrétiens comme «père
dans la foi», accomplissant ainsi
idéalement le pèlerinage à Ur des
Chaldéens.
En considérant les graves et tristes événements qui depuis cette date, assez proche dans le temps, ont
eu lieu au Moyen-Orient et dans
les régions proches, on se demande
spontanément si, après le voyage jamais réalisé, les Etats-Unis auraient
encore décidé de lancer l’intervention militaire en Irak en 2003, soutenus par le Royaume-Uni, en renversant le régime de Saddam Hussein.
L’intuition américaine que la visite programmée du Pape aurait
d’une certaine manière renforcé
Saddam et rendu plus difficile une
intervention militaire contre l’Irak
n’était pas en effet sans fondement.
TIPO GRAFIA VATICANA EDITRICE
L’OSSERVATORE ROMANO
don Sergio Pellini S.D.B.
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II
Les échos qu’aurait eus le voyage
papal en Irak, accompli avec la levée de l’embargo de la part de
l’ONU, seraient allés dans le sens
contraire à une guerre des EtatsUnis en Irak, visant à l’instauration
d’un système démocratique. En réalité, la visite de Jean-Paul II en terre
irakienne aurait probablement conduit à trouver une solution pacifique, d’autant plus qu’en réalité, ni
le programme nucléaire soupçonné,
ni les armes chimiques n’existaient,
comme cela apparut ensuite.
Un point semble certain: si cette
guerre malheureuse n’avait pas eu
lieu, n’auraient probablement pas
eu lieu ce qu’on a appelé les printemps arabes, avec leurs conséquences, ni la guerre actuelle en Syrie
qui dure désormais depuis six ans,
ni le soi-disant Etat islamique, tout
au moins en ce qui concerne les bases qu’il a réussi à établir en Irak et
en Syrie. Et en conséquence, il n’y
aurait pas eu non plus les très nombreux réfugiés qui fuient la guerre
vers l’Europe pour échapper à la
mort. Ni les migrants qui, poussés
par la faim, cherchent une perspective d’avenir, alors que beaucoup
d’entre eux, malheureusement, périssent tragiquement en mer, rendant encore plus grave une urgence
qui ne semble pas avoir de fin. Voilà une page de l’histoire qui fait réfléchir.
Abonnements: Italie, Vatican: 58,00 €; Europe: 100,00 € 148,00 $ U.S. 160,oo FS; Amérique latine, Afrique,
Asie: 110,00 € 160,00 $ U.S. 180,00 FS; Amérique du Nord, Océanie: 162,00 € 240,00 $ U.S. 260,00 FS. Renseignements:
téléphone + 39 06 698 99489; fax + 39 06 698 85164; courriel: [email protected]
Belgique: Editions Jésuites 7, rue Blondeau 5000 Namur (IBAN: BE97 0688 9989 0649 BIC: GKCCBEBB);
téléphone o81 22 15 51; fax 081 22 08 97; [email protected] France: Bayard-Ser 14, rue d’Assas,
75006 Paris; téléphone + 33 1 44 39 48 48; [email protected] - Editions de L’Homme Nouveau 10, rue de
Rosenwald 75015 Paris (C.C.P. Paris 55 58 06T); téléphone + 33 1 53 68 99 77 [email protected].
Suisse: Editions Saint - Augustin, casepostale 51, CH - 1890 Saint-Maurice, téléphone + 41 24 486 05 04,
fax + 41 24 486 05 23, [email protected] - Editions Parole et Silence, Le Muveran, 1880 Les Plans sur Bex
(C.C.P. 17-336720-5); téléphone + 41 24 498 23 01; [email protected] Canada et Amérique du Nord: Editions
de la CECC (Conférence des Evêques catholiques du Canada) 2500, promenade Don Reid, Ottawa (Ontario)
K1H 2J2; téléphone 1 800 769 1147; [email protected]
L’OSSERVATORE ROMANO
page 12
Votre prédécesseur, le Pape Benoît XVI
a mis en garde contre le risque, dans le
dialogue œcuménique, de donner la
priorité à la collaboration dans l’action
sociale, au lieu de suivre le chemin plus
exigeant de l’accord théologique. Il semble que vous préfériez le contraire, c’està-dire «marcher et travailler» ensemble
pour atteindre l’objectif de l’unité des
chrétiens. Est-ce vrai?
Je ne connais pas le contexte dans
lequel le Pape Benoît a dit cela, je
ne le connais pas et c’est pourquoi je
me trouve ici un peu en difficulté,
cela me met dans l’embarras pour
répondre... Il a voulu dire cela ou
pas... Peut-être cela a-t-il été dit
dans un dialogue avec les théologiens... Mais je n’en suis pas sûr. Les
deux choses sont importantes. Cela
est certain. Laquelle des deux a la
priorité?... Et d’autre part, il y a la
célèbre phrase d’Athénagoras — qui
est vraie, parce que j’ai posé la question au patriache Bartholomée, qui
m’a dit: «Cela est vrai» —, quand il
a dit au bienheureux Pape Paul VI:
«Faisons l’unité entre nous, et mettons tous les théologiens sur une île
pour qu’ils réfléchissent!». C’était
une plaisanterie, mais vraie, historiquement vraie; j’en doutais, mais le
patriarche Bartholomée m’a dit que
c’était vrai. Mais quel est le noyau
de cela, parce que je crois que ce
qu’a dit le Pape Benoît est vrai: on
doit chercher le dialogue théolo-
La possibilité d’un voyage avec l’archevêque de Canterbury
L’œcuménisme de la paix
pour le Soudan du Sud
L’Eglise de All Saints commença par
un groupe de fidèles britanniques, mais
c’est désormais une Congrégation internationale, avec des personnes provenant
de divers pays. Dans certaines régions
de l’Afrique, de l’Asie ou du Pacifique,
les relations œcuméniques entre les
Eglises sont meilleures et plus créatives
qu’ici en Europe. Que pouvons-nous
apprendre de l’exemple des Eglises du
Sud du monde?
«Merci, c’est vrai.
Les Eglises jeunes ont
une vitalité différente,
parce qu’elles sont
jeunes. Et elles cherchent une manière de
Au terme de la liturgie dans l’église de
s’exprimer
différemAll Saints, le Pape François a demandé que
ment. Par exemple,
l’on s’encourage les uns les autres à devenir des
une liturgie ici à Rodisciples toujours plus fidèles de Jésus, plus
me, ou bien à Londres
libres à l’égard des préjugés du passé et plus
ou encore à Paris,
désireux de prier pour les autres et avec eux et,
n’est pas la même
avant l’échange des dons, il a répondu aux
qu’une liturgie dans
questions posées par des fidèles anglicans.
ton pays, où la cérémonie liturgique, même celle catholique,
gique pour chercher également les s’exprime à travers la joie, la danse
racines..., sur les sacrements..., sur et tant de formes différentes qui sont
tant de choses à propos desquelles propres à ces Eglises jeunes. Les
nous ne sommes par encore d’ac- Eglises jeunes ont plus de créativité;
cord... Mais on ne peut pas faire ce- et au début, ici aussi en Europe,
la en laboratoire: on doit le faire en c’était la même chose: on cherchait...
marchant, le long du chemin. Nous Quand tu lis, par exemple, dans la
sommes en chemin et en chemin Didaché, comment on célébrait l’Euégalement nous discutons. Les théo- charistie, la rencontre entre les chrélogiens le font. Mais entre temps, tiens, on voit une grande créativité.
nous nous aidons, nous, les uns les Ensuite, en grandissant, en grandisautres, dans nos besoins, dans notre sant, l’Eglise s’est bien consolidée,
vie, nous nous aidons également spi- elle a grandi et est arrivée à un âge
rituellement. Par exemple, dans le adulte. Mais les Eglises jeunes ont
jumelage, il y avait le fait d’étudier plus de vitalité et elles ont égaleensemble l’Ecriture, et nous nous ai- ment esoin de collaborer, un besoin
dons dans le service de la charité, fort. Par exemple je suis en train
dans le service des pauvres, dans les d’étudier, mes collaborateurs sont en
hôpitaux, dans les guerres... C’est train d’étudier la possibilité d’un
très important, cela est très impor- voyage au Soudan du Sud. Pourtant. On ne peut pas faire le dialo- quoi? Parce que tous les évêques
gue théologique en étant immobiles. sont venus, l’anglican, le presbytéNon. Le dialogue œcuménique se rien et le catholique, les trois ensemfait en marchant, parce que le dialo- ble, pour me dire: «S’il vous plaît,
gue œcuménique est un chemin, et venez au Soudan du Sud, seulement
les choses théologiques se discutent une journée, mais ne venez pas seul,
en chemin. Je crois qu’avec cela, je venez avec Justin Welby», c’est-à-dine trahis pas l’esprit du Pape Benoît, re avec l’archevêque de Canterbury.
ni même la réalité du dialogue œcu- C’est d’elles, des Eglises jeunes,
ménique. C’est ainsi que je l’inter- qu’est venue cette créativité. Et nous
prète. Si je connaissais le contexte réfléchissons pour savoir si cela peut
dans lequel cette expression a été di- se faire, si la situation le permet làte, je dirais peut-être autre chose, bas… Mais nous devons le faire parce qu’eux, tous les trois ensemble
mais c’est ce qui me vient à l’esprit.
Le désir d’être ensemble
veulent la paix, et ils travaillent
ensemble pour la paix… Il y a une
anecdote très intéressante. Quand le
bienheureux Paul VI a célébré la
béatification des martyrs de l’Eglise
de l’Ouganda — une Eglise jeune —,
parmi les martyrs — ils étaient tous
catéchistes, jeunes — certains étaient
catholiques et d’autres anglicans, et
tous ont été martyrisés par le même
roi, en haine de la foi et parce qu’ils
n’avaient pas voulu accepter les sales
propositions du roi. Et Paul VI s’est
trouvé dans l’embarras, parce qu’il
disait: «Je dois béatifier les uns et
les autres, ce sont des martyrs les
uns et les autres». Mais à ce moment, dans l’Eglise catholique, il
n’était pas tellement possible de faire cette chose. Le Concile venait de
se dérouler… Mais cette Eglise jeune
célèbre aujourd’hui les uns et les autres ensemble; Paul VI lui aussi dans
l’homélie, dans le discours, lors de la
Messe de béatification, a voulu
nommer les catéchistes anglicans
martyrs de la foi au même niveau
que les catéchistes catholiques. C’est
ce que fait une Eglise jeune. Les
Eglises jeunes ont du courage, parce
qu’elles sont jeunes; comme tous les
jeunes, elles ont plus de courage que
nous… qui ne sommes pas très jeunes!
Et ensuite mon expérience. J’étais
très ami des anglicans à Buenos Aires, parce que l’arrière de la paroisse
de la Merced communiquait avec la
cathédrale anglicane. J’étais très ami
de l’évêque Gregory Venables, très
ami. Mais il y a une autre expérience: dans le nord de l’Argentine, il y
a des missions anglicanes avec les
aborigènes et des missions catholiques avec les aborigènes, et l’évêque
anglican et l’évêque catholique de
là-bas travaillent ensemble et enseignent. Et quand les gens ne peuvent
pas aller le dimanche à la célébration catholique, ils vont à celle anglicane, et les anglicans vont à la catholique, parce qu’ils ne veulent pas
passer le dimanche sans une célébration; et ils travaillent ensemble. Et
ici, la Congrégation pour la doctrine
de la foi le sait. Et ils font la charité
ensemble. Et les deux évêques sont
amis et les deux communautés sont
amies.
Je crois que c’est une richesse que
nos Eglises jeunes peuvent apporter
jeudi 2 mars 2017, numéro 9
à l’Europe et aux Eglises qui ont
une grande tradition. Et ces dernières peuvent nous donner la solidité
d’une tradition très, très soignée et
profondément pensée. Il est vrai que
l’œcuménisme dans les Eglises jeunes est plus facile. C’est vrai. Mais je
crois que — et je reviens à la deuxième question —, dans la recherche
théologique, l’œcuménisme est peutêtre plus solide dans une Eglise plus
mûre, plus habituée à la recherche, à
l’étude de l’histoire, de la théologie,
de la liturgie, comme l’est l’Eglise en
Europe. Et je crois que cela ferait du
bien aux deux Eglises: d’ici, de l’Europe, d’envoyer plusieurs séminaristes pour faire des expériences pastorales dans les Eglises jeunes, où l’on
apprend tant. Ils viennent des Eglises jeunes pour étudier à Rome, tout
au moins les catholiques, nous le savons. Mais les envoyer voir, apprendre des Eglises jeunes serait une
grande richesse dans le sens que
vous avez dit. L’œcuménisme est
plus facile là-bas, il est plus facile, ce
qui ne veut pas dire plus superficiel,
non, il n’est pas superficiel. Ils ne
font pas de concession sur la foi et
l’identité. Cet aborigène te dit, au
nord de l’Argentine: «Je suis anglican». Mais il n’y a pas d’évêque, il
n’y a pas de pasteur, il n’y a pas de
révérend… «Je veux louer Dieu le
dimanche et je vais à la cathédrale
catholique», et vice versa. Ce sont
des richesses des Eglises jeunes. Je
ne sais pas, c’est ce que j’ai envie de
te dire.
Visite à l’église
de All Saints
SUITE DE LA PAGE 1
démontrent «plus de créativité»
et «plus de courage» dans le domaine de l’œcuménisme.
Dans l’homélie prononcée au
cours de la liturgie, le Pape a également exhorté a remercier le Seigneur parce que «parmi les chrétiens a grandi le désir d’une plus
grande proximité, qui se manifeste dans la prière commune et
dans le témoignage commun à
l’Evangile, surtout à travers différentes formes de service». Alors
que par le passé, catholiques et
anglicans «se regardaient avec
soupçon et hostilité», à présent —
a-t-il dit — «nous nous reconnaissons tels que nous sommes vraiment: frères et sœurs dans le
Christ, à travers notre baptême
commun».
Assurément, a-t-il admis, «le
progrès sur le chemin vers la pleine communion peut apparaître
lent et incertain». Mais comme
saint Paul — qui «ne se résigne
pas aux divisions» dans la communauté de Corinthe —, les chrétiens sont appelés aujourd’hui à
«parcourir ici-bas toutes les voies
possibles d’un chemin chrétien
fraternel et commun», en pratiquant l’humilité et en se reconnaissant comme des «mendiants
de miséricorde»